D'abord un chiffre : sur les 220.000 fonctionnaires catalans seuls...9% sont payés par l'Etat espagnol. Cela signifie quoi ? Que la Catalogne est déjà indépendante de facto et depuis longtemps. Un autre chiffre : il y a, en Catalogne, 15.000 policiers catalans payés par la Catalogne contre 6.000 policiers espagnols ("la Guardia civil") payés par l'Etat espagnol. La Catalogne n'est, certes, pas reconnue comme un pays à part entière et elle n'a pas de siège à l'ONU, mais elle est mille fois plus indépendante que de la plupart des ex-colonies européennes d'Afrique, notamment du tristement célèbre "pré carré français".
Cela doit nous donner à réfléchir sur les notions d'indépendance réelle et d'indépendance fictive.
Un pays réellement indépendant comme la Catalogne peut ne pas avoir les attributs de la souveraineté, les signes extérieurs, les symboles de cette dernière tandis qu'un pays fictivement indépendant les exhibe en général sans pudeur. De plus, la Catalogne nous démontre que le désir d'indépendance n'est pas forcément fondé sur des raisons économiques (elle pèse 20% du PIB espagnol et est la plus riche région d'Espagne), ni ethniques (Catalans et Espagnols sont "Blancs"), ni religieuses (Catalans et Espagnols sont chrétiens, voire même pour la plupart catholiques), ni politiques (les indépendantistes couvrent tout le champ politique de la droite à l'extrême-gauche) mais sur le besoin de préserver une identité aussi contesté par maintes penseurs modernes que soit ce terme.
De même que les Québécois ne veulent pas être noyés dans une masse canadienne anglophone.
Alors, on entend ici et là, toutes sortes de critiques virulentes contre les Catalans parmi lesquelles celle d'"égoïsme" revient sans arrêt. En résumé, ce seraient des "riches" qui ne voudraient pas partager avec les "pauvres" d'Andalousie, d'Extremadure et d'autres régions. C'est oublier qu'au cours du demi-siècle écoulé la Catalogne a accueilli près de 500.000 "immigrés de l'intérieur" c'est-à-dire de personnes venues du sud de l'Espagne. C'est oublier aussi que la Catalogne ne porte aucune responsabilité dans le dénuement économique de ce sud déshérité. C'est oublier encore que la Catalogne a bâti son développement actuel sur le travail de ses habitants (avec certes l'appui desdits "immigrés de l'intérieur"). Alors pourquoi ce procès en sorcellerie qui est fait à ce pays ?
Ah, on risquait de l'oublier : la revendication indépendantiste catalane n'a jamais pratiqué la lutte armée. Au contraire des Basques, des Corses, des Bretons (à une certaine époque), des Irlandais du Nord etc...Pas de bombes ! Pas de cagoulés brandissant des kalachnikovs ! Alors pourquoi cette violence employée par l'Etat espagnol lors du référendum du 1er octobre dernier ? Pourquoi ces arrestations de leaders indépendantistes ? Pourquoi ces menaces de 30 ans de prison qui ont contraint Carles PUIGDEMONT, le chef du gouvernement catalan, et cinq de ses ministres à se réfugier en Belgique ? En réalité, c'est l'Espagne qui ne veut pas prendre son indépendance par rapport à la Catalogne.
D'autre part, pourquoi ce silence complice de l'Europe ?...