En effet, suite aux diverses fractures qu'a subi la majorité de l'assemblée ces derniers temps, il est mathématiquement possible désormais d'obtenir les 3/5 de votes permettant le renversement de l'exécutif mais cela à une condition : que l'opposition PPM/EPMN s'y associe. Comme chacun sait, la première fracture est venue de l'intérieur même du MIM (Mouvement Indépendantiste Martiniquais) et émane de gens qui, soudain, trouvent que Chaben est un dictateur. Pendant trente ans pour certains (es), vingt ans pour d'autres, ces mêmes gens se sont accrochés à Marie-Jeanne comme des tiques, l'ont sucé, lui doivent tout à commencer par leur carrière politique et pour quelques-uns leur emploi. Pire : ils et elles ont été incapables de conquérir la moindre municipalité durant tout ce temps ! En effet, le MIM n'a jamais eu que Rivière-Pilote, conquise par Chaben en 1971. Une seule et unique commune ! Le MODEMAS, né pourtant une vingtaine d'années plus tard, avait réussi, lui, à en obtenir deux : Saint-Anne et Prêcheur. Ce sont donc ces incapables qui sont allés créer dernièrement un nouveau parti et qui préparaient dans l'ombre l'élimination politique de Chaben.
Elimination parce que ce que le grand public ne sait pas, c'est qu'en cas de succès d'une motion de défiance contre l'exécutif, les membres de ce dernier (les conseillers exécutifs donc), ne redescendent pas automatiquement dans l'assemblée : ils sont éliminés ! Donc ce projet de motion de défiance était clair : effacer définitivement Chaben du paysage politique martiniquais puisqu'il ne détient aucun autre mandat électif. Les autres conseillers exécutifs eux deviendraient de simples conseillers municipaux d'opposition dans leurs communes respectives (F. Carole à Fort-de-France ; D. Marie-Sainte au Lamentin ; L. Boutrin au Carbet). Seuls deux s'en sortiraient : la nouvelle mairesse de Ducos qui vient d'augmenter ses indemnités de 15% dans une commune pourtant en déroute financière et le nouveau maire de droite de Saint-Joseph.
Cette motion de défiance porte donc un nom : il s'agit d'une tentative d'exécution politique.
Or, Chaben est-il un "dictateur" ? Soyons sérieux ! Un dictateur ne peut exister que dans un pays libre et indépendant, pas dans une colonie telle que la Martinique. Le président de la CTM ne pouvait pas, par exemple, décider de fermer l'aéroport du Lamentin ni le port de Fort-de-France au plus fort de l'épidémie du Covid-19. Seul le Préfet en a le droit ! Donc employer le terme "dictateur" est à la fois malhonnête, lâche et insultant. Chaben a un caractère autoritaire, cela tout le monde le sait et qui le sait mieux que toutes celles et tous ceux qui l'ont sucé jusqu'à la moëlle pendant des décennies ? Qu'ils arrêtent alors leur cinéma ! Faire mine de découvrir ledit caractère aujourd'hui, c'est prendre les Martiniquais pour des imbéciles.
S'agissant de la deuxième fracture au sein de la majorité (le Gran Sanblé pou Ba Péyi-a an Chans), elle provient du RDM et du président de l'assemblée de la CTM, Claude Lise, président de ce parti. Celui-ci n'a cessé de se plaindre du fait que l'exécutif ne lui laissait comme rôle que celui de simple passeur de parole lors des plénières, oubliant deux choses : d'abord, c'est Marie-Jeanne qui l'avait sauvé de la noyade politique en 2015 en l'imposant sur sa liste aux premières élections territoriales alors même que la plupart des membres du Gran Sanblé préféraient B-Nestor Azérot ; ensuite, c'est l'architecture ubuesque de la CTM elle-même qui est responsable de ce flou entre les pouvoirs du président de la collectivité et le président de l'assemblée, architecture que les Corses ont vite corrigée. Donc les critiques du RDM sont infondées.
Quant à la troisième fracture au sein de la majorité, elle est venue de sa composante de droite à savoir "Ba Péyi-a an Chans" de Yan Monplaisir. Ce dernier oublie ou feint d'oublier qu'i a signé un pacte de gestion avec le "Gran Sanblé", pacte visant à redresser la Martinique qu'avait sinistrée le PPM. Dans ce pacte, il est dit que la question du statut de la Martinique ne sera pas posée tout au long de la mandature. Marie-Jeanne et le "Gran Sanblé" ont respecté cet accord et n'ont jamais, à aucun moment, parlé ni d'autonomie ni d'autodétermination ni décolonisation ni d'indépendance. Cela a un prix : s'exposer aux attaques incessantes des indépendantistes purs et durs, pour la plupart non élus. Mais Chaben a assumé car il avait un seul objectif en tête ou en tout cas un objectif premier : remettre la Martinique sur les rails. C'est donc Monplaisir qui ne respecte pas aujourd'hui le pacte en question et cela pour des motifs qu'il faudra bien un jour mettre sur la table.
La coalition des aigris (Péyi-a, RDM et Droite) comptait donc présenter une motion de défiance visant à renverser le conseil exécutif et par conséquent éliminer Chaben.
Le PPM vient donc de déclarer qu'il refuse de s'associer, à huit mois des prochaines élections territoriales, à ce qu'il considère non seulement comme une manoeuvre électoraliste mais aussi comme quelque chose de dommageable pour la Martinique. C'est tout à son honneur ! Mais car il y a un mais : ce même PPM est-il en droit de donner des leçons de gestion à quiconque ? Quand on examine sa gestion passée, à l'époque du Conseil régional, on découvre ceci :
. C. Darsières, président de la Région, laisse, en 1992, un déficit de 1 milliard de francs.
. S. Letchimy, président de la Région, laisse, en 2015, un déficit de 80 millions d'euros.
Sans même parler des échecs retentissants de ce dernier jusqu'à sa défaite électorale de décembre 2015. A savoir:
__incapacité de reconstruire le lycée Schoelcher et même de réaménager l'ancienne Maternité de Redoute pour en faire un lycée de transit.
__incapacité de faire démarrer le TCSP.
__Bluff des 5.000 emplois qu'il promettait de créer comme si, en système capitaliste c'est aux collectivités de créer de l'emploi et non au secteur privé.
__échec retentissant du projet "Grand Saint-Pierre" et "Embellie des Trois-Ilets" dont il ne reste que quelques poteaux à l'entrée de l'ex-capitale de la Martinique, poteaux que le sel marin est en train de ronger lentement mais sûrement.
__Bluff de la coopération avec l'état du Para, au Brésil, et de l'antenne du Conseil régional dans sa capitale, Belem, qu'il faudra bien un jour examiner de près car des choses pas très claires s'y sont déroulées.
__incapacité d'enrayer le déclin de ce qu'il appelle pompeusement "la ville-capitale", ville où, par exemple, des rues jadis prestigieuses, en tout cas animées, voient se multiplier la fermeture de commerces les uns après les autres.
__Echec de l'importation de pierres précieuses de ce même Brésil au motif de relancer la joaillerie martiniquaise comme si, tout député qu'il est, S. Letchimy ne sait pas que le commerce de celles-ci est du domaine réservé de l'Etat.
__Refus, en 2007, de reconnaître l'empoisonnement de la Martinique par le chlordécone et mobilisation des revendeuses des différents marchés de Fort-de-France contre les écologistes (puis, 13 ans plus tard, la mise en place d'une commission d'enquête parlementaire sur le chlordécone, présidée par...S. Letchimy !!!).
__complaisance à l'endroit du noirisme et accueil en grandes pompes de Kémi Séba au Grand Carbet, chose que le PPM et surtout le maire de Fort-de-France, D. Laguerre paient lourdement aujourd'hui, ce dernier se faisant publiquement traiter de "vendu" et de "corrompu" (et même enchainer comme un vulgaire bois d'ébène) par celles et ceux que son parti flattait il n'y a pas si longtemps.
Etc...etc...
Le refus du PPM de s'associer à la motion de défiance Péyi-a/RDM/Droite montre au moins qu'il a encore le sens de l'intérêt supérieur de la Martinique, mais la virulence de son communiqué est tout à fait déplacée. Sa description d'une Martinique à l'arrêt depuis 2015 est tout simplement ridicule...
Commentaires