Il est mort,
le vieux lion de la Négritude
avec sa blanche crinière
et dans la Savane où repose le corps
de son Roi,
ils sont tous là,
pilleurs de charognes
sans vergogne,
urubus, vautours et marabouts
se battant becs et ongles
et force battements d’ailes,
tendant désespérément au bout
de cous pelés leur laide tête chauve
pour récupérer, pleins de zèle,
sur la dépouille encore chaude
un petit bout
de rouge chair
et quelques vers
d’Aimé Césaire
longtemps après qu’on l’enterre,
sans doute dans ce vain espoir
d’acquérir un peu de la force du vieux lion
consacré par l’Histoire
comme l’incarnation
de la fierté du peuple noir…
“PA MENYEN CÉSAIRE…”
J’ai l’esclavage en héritage
et j’ai voulu tourner la page,
emmener mon âme en voyage…
Mais ça m’irrite davantage
et même ça me met en rage
quand on prend les morts en otage !
Césaire, on trahit ta mémoire !
Toi, la Parole du peuple noir,
fier guerrier de la Négritude,
on fait de toi une habitude
ou, pire, une simple attitude
qu’à tout prix il leur faut avoir…
Ta référence est la posture
qu’on doit afficher sans mesure
alors que c’est pure imposture !
Marchands du Temple, un cauchemar !
Car tu n’appartiens à personne
ou bien, plutôt, à tous les hommes…
Le Poète, nul n’emprisonne
quand au cœur de ses mots résonne
un goût de Liberté en somme
qu’on peut croquer comme une pomme…
Comme à Adam, le premier homme,
la Connaissance, avec l’espoir
en même temps son fruit redonne
sa dignité à l’homme noir
qui ne souhaite voir apparaître,
comme n’importe quel autre être,
ni dieu, ni maître à sa fenêtre
mais encore moins des grands-prêtres !...
Patrick MATHELIÉ-GUINLET