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QUELLE MÉMOIRE ?

Francis CAROLE
QUELLE MÉMOIRE ?

Lors de l’installation du conseil municipal de Fort-de-France de ce mercredi 27, le maire PPM a annoncé la mise en place d’une « commission » pour « la mémoire » et « la transmission », en réponse à ce que son parti et lui-même ont cru comprendre du déboulonnage des deux statues de Schoelcher, le 22 mai.

Certes, chacun a le droit d’analyser, selon ses critères, à la fois la forme de lutte utilisée et la cible retenue par les auteur-e-s de cette action. Par contre, comment le PPM peut-il prétendre se poser en grand ouléma de « LA MÉMOIRE » quand, d’emblée, l’action revendiquée par des jeunes est « condamnée avec la plus grande fermeté », qualifiée « d’actes de vandalisme », de « révisionnisme » ? D’ailleurs qu’est-ce qui a été révisé ? Le mythe de Schoelcher « libérateur des nègres » ? Est-ce cela le crime ? Dans ce cas, il y aurait des crimes sublimes.

Ces caractérisations, brutales et sans nuances, indiquent déjà une certaine lecture de notre histoire dont les héros et les audaces émancipatrices des Africain-e-s réduit-e-s en esclavage ont si souvent été criminalisés et condamnés à l’oubli.

Les responsables politiques de notre pays ne sauraient être de lamentables gardiens de dogmes passéistes que l’histoire s’est déjà chargée de laminer. Ils-elles feraient mieux d’écouter, d’analyser, de remettre en question les certitudes qui les conduisent souvent à considérer avec paternalisme et mépris des jeunes martiniquais-es qui ne sont pas moins au fait de l’histoire de notre pays et de ses enjeux que certain-e-s des doctes élu-e-s qui se sont précipité-e-s sur les médias pour les pourfendre.

D’autre part, sur la base de quelles expertises, de quelle autorité éthique, de quelle lecture de notre histoire une telle « commission » pourrait-elle prétendre posséder la juste « mémoire », la juste conception de l’histoire pour en assurer « la transmission » ?

À bien considérer les choses, cette « commission » risque de n’être qu’un cluster idéologique au service exclusif d’un courant de pensée et de ses cercles...

Enfin, personne n’entend, comme j’ai pu le lire dans un communiqué d’un élu de rang très honorable, « rayer Victor SCHOELCHER de notre Histoire »...comme, d’ailleurs, certains ont « rayé » Cyrille BISSETTE du combat anti-esclavagiste, sans que quiconque n’en soit autrement indigné, à de rares exceptions prêt.

Par contre, disons-le clairement, il s’agit bien de « déschoelchériser» l’histoire de la Martinique. Parce qu’il y a bien eu construction d’un mythe SCHOELCHER, à travers une présentation délibérément tronquée de l’abolition, des chants à la gloire du « libérateur », des noms de rues, l’enseignement scolaire etc...Parce qu’il est clair que l’on a voulu donner tout le mérite de l’abolition de l’esclavage à cet homme là, en enfouissant dans les tombeaux de l’oubli les luttes incessantes de nos ancêtres et d’abolitionnistes comme BISSETTE. Parce que cette construction historique a été voulue, pensée et mise en œuvre jusqu’au milieu du vingtième siècle, jusqu’au moment où une nouvelle perspective a été donnée à l’histoire grâce aux recherches de Gabriel HENRY et Armand NICOLAS qui ont remis nos ancêtres au centre de leur histoire. Ces écrits et l’action constante des anti-colonialistes ont abouti à la fin de ce mythe.

Quant à la dichotomie que quelques savants penseurs essaient d’introduire entre SCHOELCHER et le schoelchérisme, comme si l’homme n’avait absolument rien à voir avec l’héritage politique qu’il a laissé, elle nous laisse pantois. Victor SCHOELCHER est certes un abolitionniste mais, comme bien de ses contemporains, il reste un euro centriste et un partisan de l’assimilation et des aventures coloniales de la France.

Francis CAROLE

MARTINIQUE

Samedi 30 Mai 2020

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