Ils furent jeunes eux aussi, pourrait-on dire. En effet, l'image qu'en général, le grand public a des écrivains est celle de personnes d'âge mur, celui, en effet, au cours duquel ils sont les plus créatifs et les plus présents dans les médias.
Mais ils et elles ont été jeunes aussi. Comme tout un chacun. Comme Monsieur ou Madame-tout-le-monde. Simplement, les photos du jeune âge de nos écrivains antillais sont plutôt rares ou en tout cas rarement utilisées. Or, il est intéressant d'étudier l'évolution de leurs visages au fil du temps car le visage, s'il n'est pas le reflet de l'âme (personne n'étant assuré de l'existence de cette dernière), reflète à tout le moins la personnalité de chacun d'entre nous. On devrait d'ailleurs dire les personnalités. Car nous sommes__et les écrivains au premier chefs__plusieurs personnalités différentes au cours de notre vie.
Notre carte d'identité nous amène à croire que nous sommes une seule et même personne de notre naissance à notre mort, ce qui est bien évidemment faux.
Nous sommes des personnes différentes aux différentes âges de notre vie. Pas totalement, mais différentes tout de même. C'est pourquoi la plupart des écrivains avouent qu'ils seraient incapables, arrivés à 50 ou 60 ans, d'écrire tel livre qu'ils ont publié lorsqu'ils en avaient 30. Cela est d'ailleurs valable pour toutes les activités humaines qu'elles soient artistiques ou scientifiques. Pour ces derniers, la situation est même pire : la créativité d'un mathématicien ou d'un physicien ne s'épanouit, sauf exception que jusqu'à...35 ans. Celle des écrivains est beaucoup plus longue et Fidel CASTRO aimait à dire qu'il n'y a que deux personnes qui ne prennent jamais leur retraite : les écrivains et les révolutionnaires. Plus longue, certes, mais l'auteur qui publie un livre à 75 ans, s'il porte le même nom et le même prénom que celui qui a publié un livre à 30 ans, n'est plus du tout la même personne. Un peu comme si l'écrivain était lui-même une fiction. Une fiction ambulante.
En regardant les photos de nos écrivains antillais jeunes, on réalise soudain qu'ils ne sont pas les personnes figées dans le marbre qu'ont construit les médias. Moins hiératiques, plus humains en quelque sorte, en tout cas moins assurés de leur destin, ils nous apparaissent soudain plus proches de nous. Sur les six photos illustrant cet article, sans doute la troisième est-elle la plus difficile à reconnaître. Il s'agit de celle de Joseph ZOBEL...
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