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Non, Yan Monplaisir, la Martinique n'est pas un état (pas encore) !

Non, Yan Monplaisir, la Martinique n'est pas un état (pas encore) !

   Peu nombreux sont les Martiniquais qui suivent les retransmissions des plénières de notre chère Collectivité Territoriale de Martinique.

   C'est vrai que ça peut être ennuyeux de suivre le défilé de tous ces conseillers (ères) qui viennent présenter et défendre leurs dossiers, chose qui, plus souvent que rarement, entraîne peu de débats. C'est que nos élus, et depuis longtemps, n'y font pas de politique, mais veulent se montrer sous le jour de gestionnaires-expert, de spécialistes des questions traitées, en évacuant assez fréquemment les choix politiques sous-jacents !!!

   Ce monstre juridique a deux têtes, imaginé par le PPM, avec son énorme prime de 11 conseillers attribués à la liste gagnante (le PPM s'estimait assuré de gagner les élections en décembre 2015), a quand même réussi à fonctionner grâce à la pugnacité de CHABEN et de son conseil exécutif. N'oublions toutefois pas que ledit montre à deux têtes avait reçu l'aval de certains (es) "patriotes" à l'époque de la commission mixte Conseil régional-Conseil général. Ils voulaient tous être ministres sans doute... Bref, l'institution a fonctionné, quoiqu'au fil du temps, les frictions entre les deux têtes n'aient cessé de s'amplifier. Au point qu'on est en droit de se demander si, à la date d'aujourd'hui, il y a encore une majorité dans l'assemblée...

    Pourtant, les Martiniquais (es) ont tort de se désintéresser des plénières car il s'y passe de temps à autre des choses tout à fait intéressantes et hilarantes tout à la fois. Par exemple, lors de la toute dernière, Yan Monplaisir s'est écrié d'une voix vibrante et dans notre idiome si peu utilisé par nos augustes élus (es) :

   "Pa di mwen pa ni lajan, ay chaché lajan ! Tout léta ka anprenté : Eta-Zini, l'Anglitè, la Fwans etc...Fok anprenté omwens 300 a 400 milion éwo !"

   Bon, y'a quand même une petite faute : on ne dit pas, en créole natif-natal "anprenté" mais "lajan-prété", ce qui aurait donc dû donner : "Tout léta ka mandé lajan-prété...". Mais, hou la, nos lecteurs (-trices) créolophones n'ont sans doute pas tout compris l'admonestation du deuxième Chaben de la CTM. En voici une traduction :

   "Ne me dites pas qu'il n'y a pas d'argent, allez chercher de l'argent ! Tous les états empruntent : les Etats-Unis, l'Angleterre, la France etc...Il faut emprunter au moins 300 ou 400 millions d'euros !".

   Le débat, on l'aura deviné, portait sur le plan de relance à mettre en place afin d'empêcher l'économie ("l'économie", en fait) de la Martinique de sombrer après les terribles deux mois de confinement. Pour Monplaisir, les actions que met en place la CTM sont tout à fait "insuffisants". Déjà, on pourrait se demander s'il existe vraiment quelque chose qui s'appelle "l'économie" dans cette île qui survit grâce à des transferts financiers franco-européens massifs, mais ça, c'est un autre débat. Certes, lesdits transferts font de nous des sortes de Koweitiens. Mais...sans pétrole. Ce qui est pour le moins dangereux. Mais bon...

   La question qui nous occupe et nous préoccupe dans l'admonestation de Monplaisir ne concerne pas le plan de relance de la CTM qui peut, en effet, se discuter, mais la question de l'emprunt. Le conseiller exécutif exhorte ou exige un emprunt, pour le moins faramineux, de 300 ou 400 millions d'euros et prend pour exemple des "états", de grands états (les Etats-Unis, l'Angleterre, pas Sainte-Lucie ou Barbade !) qui n'ont pas hésité à le faire.

   Ouais...

   On demeure perplexe : depuis quand la Martinique est-elle un "Etat" ???!!!

   Puis, notre perplexité redouble : la CTM, qui ne gère que 10% de l'activité économique de la Martinique, a-t-elle les moyens d'emprunter pareille somme ? Est-elle, quelle que soit la majorité au pouvoir, crédible aux yeux des prêteurs à savoir les banques ? Car, enfin, on a tendance à l'oublier, ce n'est pas la CTM qui paye chaque mois les infirmières, les pompiers, les enseignants, les policiers, les magistrats, les douaniers, les employés de la Sécu et des Impôts etc., bref les quelques 40.000 fonctionnaires que comptent la Martinique et qui, grâce à leurs 40%, font tourner "l'économie" martiniquaise. Ce n'est pas elle non plus qui assure le paiement des allocations diverses et variées qui permettent aux couches défavorisées de ne pas sombrer dans la misère. Celui qui paye, c'est l'Etat français...

   Si on décide de répondre à ces deux questions qui ne peuvent que plonger tout un chacun dans une profonde perplexité, on est obligé d'y répondre de la sorte :

 

   __Non, la Martinique n'est pas "un état" ! La comparer aux Etats-Unis ou à l'Angleterre est pour le moins absurde. Et Monplaisir aurait été mieux inspiré de comparer le plan de relance martiniquais à ceux de pays de taille et de populations comparable aux nôtres à savoir Sainte-Lucie, Barbade, l'île Maurice ou les Seychelles car eux aussi, ces "micro-états insulaires", ont enclenché des mesures de sauvegarde et de réactivation de leurs économies. Ils ne sont bien évidemment pas restés les bras ballants ! 

 

   __Non, la CTM n'a pas les moyens d'emprunter d'un claquement de doigt 300 ou 400 millions d'euros, sauf à endetter les générations futures (pour peu qu'une banque quelconque accepte d'accorder pareil prêt) jusqu'en...2080 au moins. Certes, le système capitaliste dans lequel nous vivons fonctionne sur l'emprunt (et non la thésaurisation), mais la Martinique vit (survit ?) déjà grâce à une sorte d'emprunt permanent, aggravé par les déficits catastrophiques de diverses gestions PPM (Darsières, Letchimy etc.), est-il donc bien raisonnable d'enfoncer le clou, d'amplifier ledit emprunt ? Surtout que les emprunts d'aujourd'hui sont les impôts de demain. Emprunter 300 ou 400 millions d'euros n'est donc sérieusement envisageable que si, par exemple, on augmente l'octroi de mer de 200% sur les voitures de 6 chevaux et plus. Entre autres mesures sévères...

  

   __Emprunter n'est pas une solution en soi car s'il s'agit de financer une relance par la commande publique, encore faudrait-il que ces sommes aillent en priorité aux entreprises locales à commencer par les entreprises artisanales et les TPE et non aux multinationales comme COLAS, MOTER, EIFFAGE etc.

 

   Yan Monplaisir étant quelqu'un d'intelligent, on préfère croire que son admonestation visait en réalité à pousser la CTM à faire un emprunt de 80 ou au grand maximum 100 millions d'euros. En effet, chacun le sait : quand on veut obtenir quelque chose, il faut toujours réclamer le maximum pour espérer obtenir ce que l'on veut réellement. Par exemple, quand Ti Sonson va acheter une voiture, il sait bien qu'il doit demander au concessionnaire un rabais de 5.000 euros pour en obtenir un de 2.000 euros. 

   Allez, chers (ères) Martiniquais (es), regardez les retransmissions des plénières de la CTM, vous ne vous ennuierez point ! Elles sont beaucoup plus instructives que Kho-Lanta ou The Voice.

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