L'astrophysicienne Vera Rubin est morte le 25 décembre 2016. Ses travaux avaient permis de valider l'hypothèse de la matière noire.
"Peut-être l'année prochaine ?" On n'entendra plus a propos de Vera Rubin cette phrase à chaque divulgation du palmarès des Nobel. Car l'astrophysicienne américaine, morte le 25 décembre 2016 à l'âge de 88 ans, était l'une des grandes oubliées du Jury de Stockholm, dont on pouvait attendre qu'il reconnaisse un jour le rôle primordial qu'elle eut dans la confirmation de l'hypothèse d'une matière noire. La matière noire ? Il s'agit de cette masse invisible de l'Univers, qui agit cependant par sa force de gravité. Comme nous l'avions expliqué dans un dossier de couverture consacré au "Mystère de la matière noire" sous la plume de notre journaliste Azar Khalatbari (Sciences et Avenir 816, février 2015), le phénomène de la matière noire a été découvert en 1933 par Fritz Zwicky (mort en 1974). L'astrophysicien suisse étudiait alors l'amas de galaxies de la Chevelure de Bérénice. Il constate que la vitesse des galaxies est si élevée que l'amas aurait dû se disloquer. Cette irrégularité n'est pas expliquée. D'où l'idée d'une matière noire, qui en serait à l'origine. Cette hypothèse est donc confirmée en 1970 par l'Américaine Vera Rubin.
Vera Rubin sur la trace de la matière noire
En étudiant la rotation de la galaxie d'Andromède, elle trouve que la vitesse des étoiles périphériques est telle qu'elles auraient dû s'échapper de la galaxie. Si elles sont solidaires, c'est parce qu'une "masse invisible" les retient, conclut-elle. Dès lors, et même si l'existence de cette "masse invisible" est débattue, la mesure est confirmée sur de nombreuses galaxies. L'hypothèse qu'il manque 90% de la masse des galaxies commence à être acceptée : on se met alors à rechercher, à partir des années 1980, cette "matière noire". Mais la discussion est toujours chaude sur la réalité de l'existence d'une matière noire. Ainsi, aujourd'hui, de plus en plus de voix s'élèvent pour dire qu'il n'y en a pas. Ainsi, des astrophysiciens ont dépouillés les données tirées du satellite américain Spitzer (il travaille dans l'infrarouge) afin d'estimer la masse des étoiles de 153 galaxies. Ils ont ensuite évalué la vitesse de rotation de ces galaxies et ont montré, avec plus de 3000 points de mesures, que la masse visible du gaz et des étoiles de chaque galaxieˆ expliquerait à elle seule ces vitesses, sans qu’il soit besoin de recourir à la fameuse matière noire...