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Le poitevin-saintongeais et les préjugés

Michel Feltin-Palas / L'express
Le poitevin-saintongeais et les préjugés

Le mépris dont fait l'objet cette langue traduit surtout le manque de culture linguistique de notre pays.

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Faites le test. Dans une soirée, annoncez que vous êtes en train d'apprendre le poitevin-saintongeais et observez les réactions. Dans 99 % des cas, vos commensaux oscilleront entre le sourire condescendant et la franche poilade.
Indiquez maintenant que vous prenez parallèlement des cours de chinois. Là, tout change. Visages ébaubis et compliments extasiés devant cette "langue remarquable".
Demandez alors aux convives ce qu'ils savent de ces deux idiomes. Priez-les d'avancer un ou deux arguments linguistiques à l'appui de la hiérarchie qu'ils viennent d'établir. Et observez. A moins de participer par inadvertance à l'assemblée générale de la linguistique comparée, vous obtiendrez en général un silence gêné. Auquel cas, n'insistez pas trop : vous risqueriez de perdre un ou deux amis...
C'est ainsi. En France, on ne reçoit aucun enseignement sur les langues, mais on a un avis sur la question - tranché de surcroît. Et si j'aime prendre l'exemple du poitevin-saintongeais et du chinois, c'est qu'il permet de bien faire comprendre l'idée suivante : en général, les modes de communication des humains ne sont pas jugés selon leur valeur propre, mais selon les représentations qui y sont associées. Le chinois (le mandarin, en fait) ? La Chine évoque une grande civilisation (ce qui est vrai). Le poitevin-saintongeais ? Cela sent tellement sa province qu'il ne peut s'agir que d'un patois sans valeur aucune, tout juste bon à parler aux chèvres et à produire du chabichou. Sauf que... pas du tout.
Le poitevin-saintongeais a une première singularité. De toutes les langues latines, il est le seul à avoir conservé un pronom de genre neutre, à la différence du français, par exemple. Comme le fait remarquer le grand linguiste Claude Hagège, cette spécificité remarquable mérite à elle seule le respect. "Nous utilisons le pronom neutre "o" devant consonne qui peut devenir soit "ou" soit "ol" devant voyelle, explique Jean-Jacques Chevrier, coauteur de Le Poitevin-Saintongeais, langue d'oïl méridionale (avec Michel Gautier). Il s'agit en fait d'une évolution du latin hoc (cela), que l'on retrouve dans des phrases comme o fàut (il faut), o marche (ça fonctionne), o moulle (il pleut), etc." Aucune "déformation du français", en l'occurrence, comme certains l'affirment parfois faussement, mais une évolution différente du latin, au même titre que le roumain, le castillan, le catalan...
Le poitevin-saintongeais a une seconde particularité : il constitue un laboratoire parfait d'une zone d'évolution linguistique. Pendant des siècles, cette région a vécu en langue d'oc, au point que l'un des premiers troubadours fut Guillaume IX d'Aquitaine, VIIe comte du Poitou. Puis, au fil des siècles, le français y a étendu son influence. Résultat : cet idiome s'est peu à peu "désoccitanisé", au point de présenter aujourd'hui de nombreux traits communs aux langues d'oïl et d'oc, ce qui lui confère un grand intérêt.
Voilà les faits, qui illustrent une vérité générale : d'un point de vue linguistique, aucune langue n'est supérieure à une autre, pas plus le mandarin que l'anglais, le russe, l'arabe ou le français. Certaines bénéficient simplement d'un statut officiel; d'autres en ont été privées, mais toutes méritent le respect. Ol ét bén cunprés? (1)
(1) "C'est bien compris ?", en poitevin-saintongeais.
A écouter
C'est l'occasion ou jamais. Voici une chanson écrite en poitevin-saintongeais par Mathieu Touzot.
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