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Le luxembourgeois, cette langue «superflue»

Marlene Brey ("Luxemburger Wort")
Le luxembourgeois, cette langue «superflue»

Publiée mi-avril, une étude de l'Uni sur les offres d'emploi au Luxembourg entre 1984 et 2019 montre que l'anglais prend de plus en plus d'importance, même si le français reste la langue dominante. Explications avec Fernand Fehlen, sociologue à l'Uni.

L'analyse des petites annonces passées dans le Luxemburger Wort au cours des quatre dernières décennies traduit une évolution du monde du travail. Publiée mi-avril, l'étude démontre notamment la montée en puissance de l'anglais, mais aussi du luxembourgeois. Revue de détail avec Fernand Fehlen, sociologue à l'Uni, spécialiste des langues au Grand-Duché.

Pour être un candidat parfait, quelles sont les langues à maîtriser?

Fernand Fehlen - «Le marché du travail est très fragmenté, c'est pourquoi la réponse à cette question dépend du secteur d'activité. Nous avons analysé 8.340 annonces publiées dans le Luxemburger Wort qui couvrent principalement le secteur public et les secteurs associés tels que l'éducation, la formation, les services sociaux et les soins de santé.

Quelles exigences linguistiques émergent de ces annonces?

«La demande de trilinguisme est en hausse dans ces offres d'emploi, à savoir la maîtrise de l'allemand, du français et du luxembourgeois. Et si une seule langue est demandée, c'est le français. Il faut tout de même noter que parmi les trois langues du pays, le luxembourgeois occupe un statut paradoxal. C'est la compétence la plus rare et la plus recherchée. Mais en termes purement pragmatiques, c'est aussi celle qui est 'superflue'.


Qu'entendez-vous par là?

«L'utilisation du luxembourgeois à l'écrit est marginale et comme il n'existe pratiquement pas de Luxembourgeois qui ne parlent pas au moins une autre langue officielle, cette langue n'est pas indispensable pour la communication orale. Nous faisons donc, dans l'étude, une distinction entre les langues requises et les langues souhaitées. Le luxembourgeois apparaît comme la langue la plus souhaitée. Mais les employeurs sont également conscients qu'ils ne trouveront pas toujours cette compétence. Au cours des cinq dernières années, on a l'impression que les employeurs sont désespérés à trouver ce personnel parlant luxembourgeois et qu'ils se sont résignés.


 

Dans ce contexte, quels sont les emplois du secteur public les plus susceptibles d'accepter un candidat qui ne parle pas les trois langues du pays?

«Les compétences linguistiques ne sont qu'une partie des exigences. C'est pourquoi nous notons que plus les qualifications sont faibles, plus le capital linguistique est important.

A l'inverse, cela signifie-t-il que plus une personne est instruite, moins ses compétences linguistiques sont primordiales?


«Dans ce cas de figure, la maîtrise des langues est reléguée au second plan, car les autres compétences sont importantes. Entre 2018 et 2019, 11% des embauches à l'Etat ont été exemptées de la clause linguistique, alors même que le trilinguisme est exigé. Cela signifie que même l'Etat ne parvient pas toujours à trouver des personnes hautement qualifiées et trilingues.


 

Ce constat s'applique-t-il également au secteur privé?

«Oui, et pour plusieurs raisons. D'une part car cette combinaison n'existe n'existe tout simplement pas si souvent, à savoir la compétence-clé et le multilinguisme et d'autre part parce que le contact avec le public n'est pas si fréquent.

Qu'en est-il de la situation linguistique dans le commerce?

«Les employeurs ne demandent plus le luxembourgeois parce que le personnel qui parle la langue n'existe pratiquement pas. Le luxembourgeois a donc principalement une fonction symbolique. Par exemple, une grande entreprise internationale de la construction va rechercher quelqu'un qui le parle car elle sait qu'elle va devoir à faire avec l'Etat. Donc si vous voulez faire du lobby au Luxembourg, vous devenez avoir quelqu'un qui maîtrise la langue. Je ne peux pas le prouver scientifiquement, mais certaines personnes me disent que toutes les grandes entreprises essaient d'avoir un natif comme figure de proue au Luxembourg.

En ce promenant dans la capitale, l'anglais est une langue fréquemment entendue. Est-ce aussi vrai sur le marché du travail?

«Bien sûr. Cela s'explique par la croissance économique de ces dernières années et la croissance démographique liées à l'implantation d'entreprises internationales. Elles ne sont pas présentes ici en raison des résidents luxembourgeois et travaillent dans la langue de la maison-mère. Pour la plupart des institutions financières, c'est l'anglais. Au point que cette langue est devenue la lingua franca de la finance et d'autres secteurs de l'économie.

La langue de Shakespeare pourrait-elle suppléer le français dans la vie quotidienne, en lien avec les évolutions du marché du travail?

«Le développement économique modifie en grande partie la situation linguistique du pays. Les entreprises attirent les personnes qui parlent le langage de l'entreprise. Le personnel cherche alors une solution pragmatique dans la vie quotidienne. C'est pourquoi je suis convaincu que l'anglais l'emportera.

Désormais, le français, l'allemand, le luxembourgeois et l'anglais comptent sur le marché du travail. Qui parle réellement quatre langues couramment?

«Quelque chose a changé au cours des cinq dernières années. Le cadre européen de référence pour les langues, c'est-à-dire la classification des niveaux de langue de A1 à C2, a fait son entrée dans les offres d'emploi. Cela signifie que les employeurs ne se contentent pas d'énumérer les langues, mais qu'ils écrivent désormais explicitement le niveau dans la description du poste - cela vaut pour la banque, la crèche et le supermarché.»

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