Baisse de l’attractivité chez les étudiants, hausse de la précarité de l’emploi, désintérêt de l’administration, rareté des embauches dans la recherche publique… Soutenir une thèse aujourd’hui vaut-il encore la peine ?
Décrocher un doctorat, diplôme le plus élevé de l’université, devrait ouvrir grand les portes des emplois hautement qualifiés et bien rémunérés à des postes à responsabilité, tant dans les entreprises privées que dans la fonction publique. C’est bien le cas en ce qui concerne l’accès à l’emploi : 90 % des lauréats sont en poste trois ans après leur thèse, estiment nombre d’enquêtes.
On trouve donc encore 10 % de chômeurs, un taux supérieur, par exemple, à celui des infirmiers. Les rémunérations, elles, sont correctes dans le privé, mais l’écart avec celles d’un ingénieur recruté à bac + 5 n’est pas toujours au niveau de l’écart de qualification et d’expérience. Et les salaires d’entrée dans l’enseignement supérieur et la recherche publique restent modestes, à peine supérieurs à 2 000 euros mensuels.
Surtout, c’est là que l’on trouve l’essentiel des 33 % d’emplois précaires trois ans après obtention du doctorat, une proportion en hausse constante, puisqu’ils n’étaient que 24 % en 2004, d’après le rapport 2018 sur « L’état de l’emploi scientifique en France » du ministère de l’enseignement supérieur, de la recherche et de l’innovation (Mesri). Cette précarité est souvent liée aux contrats « post-doctoraux », une main-d’œuvre décisive de la recherche publique censée déboucher sur l’emploi pérenne (universitaires, chercheurs ou ingénieurs). Mais la raréfaction des recrutements ces dernières années provoque des évictions douloureuses à 35 ans passés, absentes des statistiques, qui ne considèrent guère le devenir des docteurs au-delà de trois ans après la thèse.