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La belle époque des bisous au "dictateur"

La belle époque des bisous au "dictateur"

   Rappelez-vous en ! Il n'y en avait que pour lui, le CHABEN, entre 2015 et la mi-2018. Tout le monde s'empressait de l'enlacer tendrement, de l'embrasser, de lui murmurer des mots tendres à l'oreille.

   Et puis, blip ! comme on dit en dialecte local, voici que les embrasseurs et embrasseuses se sont mis (es) à le pointer du doigt, à le dénoncer, à le vilipender même pour certains (es). Et ces messieurs-dames, passant de l'amour au désamour, n'y allèrent pas par quatre chemins à partir de 2019 : "CHABEN est un dictateur !". Point à la ligne.

   Sauf qu'il y a d'abord un problème de définition lexicale qui se pose chez ces grands défenseurs de la langue française et de la République Une et Indivisible : ils et elles confondent "dictateur" et "autocrate". D'abord, la Martinique n'est pas un pays indépendant et CHABEN n'a aucun pouvoir ni d'emprisonner ses opposants ni de fermer une radio une télé un journal ou un site-web tel que le nôtre ni de dissoudre un syndicat ni d'interdire une manifestation. Un dictateur, oui ! Et des dictateurs, on en trouve, hélas, à la pelle dans nombre de pays indépendants : Philippines, Cameroun, Togo, Egypte, Corée du Nord, Brésil, Turquie etc...

   Donc, ou bien les flatteurs/embrasseurs d'hier n'ont qu'une connaissance approximative de la langue de leurs ancêtres les Gaulois ou bien ils/elles sont intellectuellement malhonnêtes. Un dictateur et un autocrate, sé dé bagay ki diféran ! Charles DE GAULLE était un autocrate qui, par exemple, se refusa à emprisonner Jean-Paul SARTRE lorsque ce dernier appelait à l'insurrection les ouvriers de l'usine Renault. Plus près de nous, Eugenia CHARLES, première ministre de la Dominique, et Hugo CHAVEZ, président du Venezuela, furent des autocrates. Pas des dictateurs ! CHAVEZ organisa ainsi pas moins de 5 élections qu'i remporta toutes et pas du tout avec des scores "françafricains" de 99% des voix. Dans un registre différent, l'affreux TRUMP fut un autocrate qui ne fut tenté par la dictature qu'à l'extrême fin de son mandat lorsque ses partisans envahirent le Capitole.   

   S'ils connaissaient donc la langue de leurs ancêtres gaulois, les embrasseurs ne confondraient pas les deux termes et s'ils ne méprisaient pas celle de leurs véritables ancêtres, ils sauraient que fok pa konfonn koko épi zabriko.

   Ensuite, cela fait maintenant plus de 45 ans que CHABEN est en politique. Il fut maire, conseiller général conseiller régional, président de Région, député et aujourd'hui président de Collectivité. Celles et ceux qui par conséquent l'accusent aujourd'hui d'être un dictateur avaient tout le temps, largement le temps, de savoir qui il est, comment il agit et réagit, quel rapport il entretient avec ses partenaires et ses adversaires. A qui vont-ils/elles faire croire qu'ils viennent de découvrir qu'il est un "dictateur" ? Arété pwan moun pou tèbè adan ti péyi-tala ! En réalité, ces messieurs-dames se sont hissés sur ses épaules pour assouvir leur désir d'être élus (es). Sans vergogne ! San kaka bò zié !  

    Enfin, s'il a d'indéniables comportements autocratiques dans certaines circonstances, CHABEN n'est pour rien dans l'architecture de cette nouvelle collectivité qu'est la CTM. Avons-nous oublié que ladite architecture fut conçue par et pour le PPM ? Avons-nous oublié que ce fut du prêt-à-porter pour Serge LETCHIMY et le PPM ? Rien qu'un exemple : la prime anti-démocratique de 11 élus offerte au vainqueur des élections territoriales fut une invention du PPM lequel avait même tenté de la faire fixer à...13. Le choix d'un "Conseil exécutif" (où l'opposition est absente) au lieu d'une "Commission permanente" (où l'opposition est présente comme en Guyane) fut également concocté du côté de l'Ancien Réservoir de Trénelle. Cette architecture faisait le lit d'une présidence autocratique et ceux qui l'ont conçue n'ont qu'à s'en prendre qu'à eux mêmes !

   Mais reconnaissons tout de même qu'en refusant de s'associer à la motion de défiance que voulaient faire voter les embrasseurs et embrasseuses d'hier, le PPM a fait preuve, une fois n'est pas coutume, de lucidité et de courage politiques. Car, ne nous y trompons pas ! Cette motion, si elle était passée, aurait tout simplement relevé de l'assassinat politique. Pourquoi ? Parce que, autre aberration de l'architecture de la CTM, quand le conseil exécutif est renversé, ses membres ne retournent pas dans l'Assemblée comme simples conseillers territoriaux. Ils sont tout simplement renvoyés dans leurs foyers ! CHABEN n'étant plus maire et ne disposant plus d'autre mandat politique aurait pu ainsi être jeté aux oubliettes de l'histoire. C'est sans doute le calcul sordide qu'avait fait les embrasseurs et embrasseuses, ceux-là même qui s'étaient hissés sur ses épaules pour être élus. Sé moun-tala pa ni kaza bò zié !

   Final de compte, tout bien réfléchi, lè ou fè tranndouz-mil katjil, on est bien obligé d'arriver à la conclusion qu'il vaut mieux réélire un autocrate que des hypocrites, des faux-jetons, des traitres et des arrivistes d'autant que ces personnes n'ont aucun programme sérieux à proposer au peuple martiniquais. Ils et elles s'embrassent désormais entre eux, mais si par malheur, ils remportaient les élections, vous les verriez un an ou deux ans après, s'entredéchirer et se traiter les uns les autres de...dictateurs.

   Il faut arrêter avec les bals masqués. Sauf pendant les trois jours du carnaval évidemment...

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