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GÉRALD BLONCOURT, DANS LES PAS DU PEUPLE PORTUGAIS

Cathy Ceïbe
GÉRALD BLONCOURT, DANS LES PAS DU PEUPLE PORTUGAIS

L’ouvrage le Regard engagé avec les fils des grands découvreurs retrace le magnifique travail de Gérald Bloncourt au Portugal, décliné en quatre parties : sous le joug de la dictature, sur les routes de l’exil, dans les bidonvilles de la région parisienne et enfin dans un pays libéré par une révolution atypique.

Gérald Bloncourt s’est pris de passion pour les grands découvreurs portugais en feuilletant les livres de sa mère haïtienne. Il se promet qu’un jour il partira à la rencontre de ce grand peuple qui s’est élancé sur les flots du monde entier. Fondateur du Parti communiste haïtien, résistant, Gérald Bloncourt est expulsé de sa patrie. Il arrive en France, se forme à la photo. Il travaille à l’Humanité puis à l’Avant-garde et à la Vie ouvrière. Il fixe alors son objectif sur le monde du travail, épousant les luttes sociales qui ont jalonné la seconde moitié du XXe siècle. Occupations d’usines, manifestations, scènes de rue et l’intimité des foyers des masses laborieuses.

Alors que la tour Montparnasse s’érige, il fait la connaissance de ces travailleurs immigrés qui ont quitté le Portugal. Il se souvient « de la minutie avec laquelle ils soignaient leurs outils ». Gérald Bloncourt garde en tête la patrie des navigateurs. À la fin des années 1960, le désormais écrivain, peintre et poète s’y rend enfin, « en costard et cravate », en « touriste » afin de ne pas éveiller les soupçons. Le pays est alors sous « la chape de plomb » de la dictature salazariste. En guise d’État nouveau défendu par le régime autoritaire, le peuple tutoie la misère. Les démocrates et les progressistes sont pourchassés par la Pide, la police politique. Les guerres coloniales sont d’une barabarie inouïe. Il écume les baraquements de Lisbonne, part vers le Nord, dans la région de Chaves. Il caresse de son regard professionnel le quotidien des paysans livrés à leur sort, des vendeurs ambulants, des bergers au manteau de paille, des sourires des enfants qui n’ont rien perdu de leur malice malgré le dénuement.

L’exil douloureux

Les bourgades se vident alors de leurs forces vives qui, muées par le désir d’une vie meilleure, partent sur les routes d’un exil douloureux. Gérald Bloncourt les accompagne, sur les chemins clandestins des Pyrénées, à leur arrivée à la gare d’Hendaye, surchargés par de petites valises, avant le grand saut dans l’inconnu. De son contact direct avec ceux que la « saudade » du pays a toujours habité, il pénètre alors dans leur nouvel univers : les bidonvilles de la région parisienne.

L’ouvrage le Regard engagé avec les fils des grands découvreurs retrace le travail profondément humain réalisé par Gérald Bloncourt. Ses images n’ont rien de misérabiliste. Au contraire, il a réussi l’extraordinaire projet de restituer la dignité et la grandeur de ces femmes, de ces hommes et de ces enfants parqués dans les « bairos de lata », ces quartiers de tôle, où la pauvreté n’est pas sans rappeler celle qu’ils ont quittée. Les scènes de vie et de travail que le photographe a immortalisées transpirent l’élégance des gens simples. « Je les respecte. Je n’ai photographié que ce que j’ai vu pour créer de la conscience. Il y a toujours de l’espoir », explique Gérald Bloncourt.

Ses voyages au Portugal, sa plongée dans le monde de l’immigration clandestine jusqu’aux campements dressés aux portes de Paris n’auraient pu être complets sans un chapitre consacré à la révolution des œillets. Le photographe a vécu la folle journée du 1er Mai de la liberté, le 1er Mai 1974. Il pleurait d’émotion et devait s’essuyer les yeux pour faire les mises au point de clichés historiques qui ont immortalisé le souffle qui a transformé ce petit pays, là-bas, au bout de l’Europe, au peuple si droit, si fier.

Le Regard engagé avec les fils des grands découvreurs. Conception et réalisation : Daniel Bastos. Préface d’Eduardo Lourenço. Éditions Converso Editora, Portugal 2015.

Commande : Parcidio Peixoto, président de l’association Mémoires des migrations, a.memoriadesmigracoes@orange.fr

Cathy Ceïbe

 

Post-scriptum: 
En 1966, le quotidien de ces deux petites filles, à Lisbonne, semble bien misérable, même si les corvées se font avec le sourire Photo : Gérald Bloncourt

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