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FORT-DE-FRANCE SE RELEVERA-T-ELLE DE LA CRISE DU COVID-19 ?

FORT-DE-FRANCE SE RELEVERA-T-ELLE DE LA CRISE DU COVID-19 ?
 
  La ville-capitale, comme aime à l'appeler le PPM qui la dirige depuis plus d'un demi-siècle, était déjà bien mal en point avant l'arrivée du coronavirus et son confinement.
 Municipalité endettée jusqu'au cou et de facto mise sous tutelle, rues du centre-ville se désertifiant peu à peu comme la célèbre et autrefois bourgeoise rue Victor Hugo, fermetures de commerces, diminution de la population année après année, augmentation de la délinquance, du nombre de djonmpi (SDF) etc., tout cela dressait déjà un paysage sinistre que la brutale épidémie est venu obscurcir encore plus.
  Désertée depuis deux mois maintenant, Foyal semble être devenue une ville-fantôme.
 Dès lors une question se pose : pourra-t-elle se relever lorsque la crise sera passée ? On se souvient qu'il y a quelques mois de cela, la CTM avait débloqué des fonds pour venir en aide à un certain nombre de commerces en grave difficulté. Et puis le Covid-19 est arrivé ! Tel un coup de grâce. Il n'est pas besoin d'être expert en économie pour pressentir que les faillites vont se multiplier, comme après la grève générale de février 2009, mais cette fois en beaucoup plus grand nombre. Malgré les mesures prises par l'Etat pour amortir le choc (chômage partiel, prêts bancaires facilités etc.), on voit mal comme des entreprises déjà exsangues avant la crise pourraient comme par magie se redresser.
  Cela signifie qu'une grave crise sociale se profile à l'horizon qu'aucun des beaux discours sur "le Monde d'après" ne pourra contenir. En fait, c'est tout le modèle économique martiniquais qu'il aurait fallu réformer et cela depuis des années déjà. Entre Békés prédateurs vivant de subventions européennes, des 40% des fonctionnaires et des allocations versées aux classes populaires d'un côté, et de l'autre, collectivités locales vivant de l'octroi de mer et des impôts locaux, la Martinique a avancé sur une corde raide comme une funambule. Or, voici que le Covid-19 est venu brutalement casser cette corde.
  Désormais, le roi est nu ! Plus personne ne pourra continuer à se boucher les yeux et faire semblant de ne pas voir que le système socio-politique et économique mis en place à partir de 1946 est à l'agonie. Il était déjà à bout de souffle, le Covid-19 est venu l'euthanasier. Les Martiniquais ont tout essayé en élisant d'abord la Droite, puis les Autonomistes, puis les Indépendantistes. Tous ont échoué à modifier significativement la donne. Ce n'est pas que rien n'a été fait : des routes ont été construites, des écoles et des lycées sont sortis de terre, le système hospitalier a été amélioré, le tourisme se porte mieux etc. La Martinique de 2020 n'a plus rien à voir avec celle de 1946. Il serait malhonnêteté de ne pas reconnaître également une nette augmentation du niveau de vie pour une grande partie de la population.  Sauf qu'en réalité, tout cela a été une cautère sur une jambe de bois. Un trompe-l'oeil. Un faux-semblant qui a longtemps été efficace avec ses tours de passe-passe, ses fausses promesses et ses revirements.
 La vérité est qu'aucune économie nouvelle n'est venue remplacer la vieille et tri-séculaire économie de plantation. A l'emplacement des usines à sucre se sont élevés des supermarchés. Les transferts financiers massifs ont étouffé dans l'œuf toute production locale d'envergure, à part celle du rhum. La Martinique est devenue entièrement dépendante de la France et de l'Europe. Elle vit (ou survit) sous transfusion financière sans se soucier du fait que toute transfusion doit s'arrêter à un moment soit parce que le malade est guéri soit parce qu'il est condamné et qu'il n'y a plus rien à faire. Même si les Martiniquais jouent aux "Koweitiens sans pétrole", ils savent bien, au fond d'eux-mêmes, que leur horizon est bouché. Les premiers à les savoir sont les jeunes qui s'en vont à l'étranger, souvent définitivement, à raison de 4.000 par an. Une véritable saignée qui depuis trois décennies a transformé la Martinique non plus en "l'île des revenants" comme continuent à le répéter les dépliants touristiques, mais en "l'île des centenaires". A l'époque, le journal FRANCE-ANTILLES mettait l'une ou l'un de ces derniers à l'honneur quasiment chaque semaine. 
   Malheureusement, ceux qui ont pris conscience de ce désastre annoncé et qui combattent le système depuis des lustres ont fini par d'enferrer dans une maladie qu'il faut bien appeler "la revendicationite". Non pas que revendiquer soit le moins du monde condamnable et c'est même là la tâche, ô combien noble, des syndicats, par exemple, mais se contenter de ne faire que cela sans rien proposer d'autres que des slogans creux du genre "La meilleure chance de la Martinique sont les Martiniquais" ou "Matinik sé ta nou !", n'aboutit en réalité qu'à conforter le système en place et à transformer les Martiniquais en "mendiants arrogants", selon la terrible expression d'Aimé CESAIRE. Si l'on veut être moins sévère que ce dernier, on pourrait parler de nationalisme de pacotille. Car enfin, où est, chez les autonomistes, le programme CONCRET de l'autonomie ? Où est, chez les indépendantistes, le programme CONCRET de l'indépendance ? Pour cela, encore aurait-il fallu que nos autonomistes aillent voir comment fonctionne un territoire autonome et nos indépendantistes un pays indépendant (et pas n'importe lequel mais un état micro-insulaire). Or, on ne sache pas que pareille chose ait jamais été faite. 
  Du coup, le peuple n'a pas confiance et il a raison. 
 Il élira, certes, en grand nombre des autonomistes et des indépendantistes, mais quand le moindre début de commencement d'heure de vérité pointera le nez, il fera machine arrière à grand balan : c'est pourquoi, en 2010, 78% des Martiniquais ont repoussé cette "poussière" d'autonomie que pouvait être l'Article 74. Mais une poussière ne vaut-elle pas mieux que rien ? Le Covid-19 vient d'en donner la preuve par neuf : le président de la collectivité de St-Barthélémy (Article 74) peut décider de fermer le port et l'aéroport de son île mais son alter ego de la Martinique (Article 73) n'a aucun droit de le faire car c'est le Préfet et lui seul qui peut décider pareille chose.
 La Martinique est donc enferrée. L'épidémie actuelle s'apprête-t-elle à lui donner le coup de grâce ? Si, par malheur, la réponse est oui, eh bien Fort-de-France, sa désuète "ville-capitale", Foyal pour les intimes, sera la première à monter sur l'échafaud...
   Car c'est bien beau de brailler sans arrêt contre les Békés, le capitalisme, l'Etat colonial etc., c'est bien beau de passer son temps à revendiquer et toujours revendiquer, mais la suite du programme c'est quoi ? Continuer à revendiquer jusqu'ad vitam aeternam ?...   

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