C'est lui, "Chaben", et personne d'autre qui devra diriger la Collectivité Territoriale de Martinique.
Pourquoi, me demandera-t-on ? D'abord parce que tout en étant un homme inébranlable dans ses convictions, il respecte le peuple, il sait comprendre ses hésitations, ses reculades, il sait appréhender ses peurs. Il est un homme de longue patience contrairement à nombre de patriotes ou de souverainistes, notamment moi. Il a un flair populaire extraordinaire et dans les meetings, il sait prendre la température exacte des personnes présentes. Il sait quand il faut chauffer la salle, quand il faut faire de l'humour, quand il faut prendre un ton grave. Il a l'art d'exposer les choses compliquées de manière compréhensible pour tout un chacun, cela dans un créole remarquable.
Ensuite, parce qu'il ne se réclame d'aucun papa. Comme il le dit lui même, il lui arrive de citer Aimé Césaire quand cela est nécessaire, mais il ne fait pas comme certains qui "le déterrent chaque matin pour s'en servir comme prétexte avant de l'enterrer chaque soir". Il ne se cache sous l'aile protectrice de quiconque même si Frantz Fanon est l'un de ses maîtres à penser. Cela aussi est important : il ne récite pas de catéchisme comme certains de ses adversaires et est donc libre dans sa tête. L'homme qui dirigera la future CTM devra posséder une hauteur de vue jamais requise jusqu'à ce jour à la tête d'une collectivité en Martinique.
Il ne devra pas non plus faire preuve d'esprit dogmatique.
Et contrairement à certains de ses détracteurs qui le décrivent comme un dogmatique, un dictateur, un colérique, Marie-Jeanne a toujours su faire preuve de pragmatisme chaque fois que cela s'est avéré nécessaire au cours des quarante dernières années. Pierre Petit, Lucette Micheaux-Chevry ou Antoine Karam en savent quelque chose. "Chaben" n'a jamais fait de rodomontades non plus. Il n'a jamais demandé à "Messieurs les Européens de faire leurs valises avant qu'il soit trop tard" ni appelé à jeter les Békés à la mer. Au cours des meetings de ces jours derniers, j'ai observé qu'il conserve ce cap : inflexible face à l'exploitation des travailleurs, intraitable face au pouvoir français, mais sans une once de démagogie ni de racisme.
Quel est son programme, demandera-t-on enfin ? Je suis, pour ma part, assez sceptique face à ces plaquettes joliment fabriquées que tous les partis politiques sans exception sortent de leur chapeau à la veille des consultations électorales. Mais c'est la tradition et aller à une élection sans programme, c'est comme inviter à une première communion sans prévoir de pain-au-beurre-chocolat. Marie-Jeanne et le "GRAN SANBLE" ont évidemment un programme, un programme solidement charpenté même, fort d'idées novatrices, qui sera présenté sous peu et chacun jugera de sa valeur. Il l'a construit de concert avec les responsables des six partis politiques qui constituent l'alliance qu'il conduit aux élections. Mais à mon humble avis, un programme n'est rien s'il n'est pas adossé à un dirigeant d'envergure et à une équipe solide. Or, "Chaben" a largement fait ses preuves en tant que maire et président de Région. Il a su s'entourer des meilleures compétences et même si tout ce qu'il a accompli n'est pas parfait, l'honnêteté, la simple honnêteté, commande de reconnaître que son bilan est très largement positif.
Nous sommes, nous Martiniquais, à un tournant de notre histoire. Nous nous devons de confier les rênes du pouvoir à des hommes d'expérience comme Alfred Marie-Jeanne et Claude Lise dont ce sera de toute évidence le dernier challenge politique. Livrer la CTM à des personnes qui n'ont pas fait leurs preuves ou qui n'ont pas encore eu l'occasion de le faire reviendrait à conduire le navire Martinique à l'aventure. Surtout que les soi-disant "jeunes" actuellement au pouvoir, quadragénaires et quinquagénaires pour la plupart, n'ont rien démontré de bien convaincant : un lycée de transit à l'ex-Maternité toujours pas achevé ; un TCSP dont le tracé a été modifié pour des raisons peu évidentes et donc le coût de revient a explosé ; une Tour Lumina qui n'illumine rien du tout et qui est aux trois-quarts vides ; 5.000 emplois dont on n'a guère vu que 500, ceux qui ont permis à la Région d'embaucher massivement parents, amis et alliés ; 17 zones d'activité économiques dont une seule a vu le jour et c'est une déchetterie etc...etc...sans compter les multiples affaires de corruption qui ont émaillé l'actualité de ces derniers mois.
Alors, on dira : mais il est vieux. Chaben est trop vieux !
A cela, j'ai coutume de rétorquer : comme Hugo Chavez, hélas décédé à 58 ans, aurait aimé devenir vieux comme Alfred Marie-Jeanne (78 ans) ! Allez donc le voir dans les meetings du "GRAN SANBLE" où il parle après tout le monde, le dernier, vers 10h, parfois 11h du soir donc, quand la fatigue commence à se faire sentir et qu'on n'a plus les idées très claires. Eh bien, lui "Chaben", il les a ! Il discoure sans notes pendant trente minutes, trois-quarts d'heure, parfois une heure en arpentant l'estrade au lieu de se tenir derrière le pupitre prévu pour les orateurs, et il explique, il commente, il critique, il propose, il rappelle, il souligne. Un véritable show qui parfois donne le tournis ! Je me demande souvent d'où il tire tant d'énergie à son âge. Héritage génétique sans doute...
Au meeting du Robert, jeudi passé,, avec cette capacité d'autodérision qui le caractérise, il a déclaré que son cœur est en parfait état mais que tout ce qu'il lui demandait, c'était de tenir au moins jusqu'au 6 décembre prochain. Eclats de rires dans la salle comble et l'extérieur bondé.
"Chaben", sé WOU nou lé ! Nou pa lé pèsonn dot !
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