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AIMER LA BEAUTÉ À PERDRE LA RAISON : LA SEULE JUSTE CAUSE !

AIMER LA BEAUTÉ À PERDRE LA RAISON : LA SEULE JUSTE CAUSE !




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...............Oui, puisque on approche des fins ultimes dans le domaine de mes écritures saintes, vu que pour être franc pas un journal français n'a accepté ma prose, y compris la presse littéraire, sur des articles qui valaient bien ce que je lisais moi, que j'avais ciselés en particulier sur la littérature antillaise où j'ai parfois dû citer Raphaël C. comme dans le roman de Kafka Monsieur K. Et, final de compte seul MONTRAY KREYOL m'a accepté ou plutôt m'a invité, après lecture d'un banal poème par celui qui y mène la danse, bien plus recta que les directeurs de publication de la grande presse française, bien plus proche dans la liberté d'expression de ce qui se faisait à la fin du siècle, hélas l'avant dernier, le XIXème car hélas aussi je les connais un par un les directeurs de publication français, vous voulez leur noms ? Pas la peine !

 

...............Mais si un jour l'association des amis de MONTRAY KREYOL se réunit pour une Assemblée Générale pour festoyer et tenir ripaille, tout simplement pour se connaître, je serai-là, je le jure avec un magnum de Mouton Rothschild 1953, un héritage, paraît que çà vaut une fortune et qu'aujourd'hui c'est devenu pièce de musée. On lui fera digne fête et on trinquera à leur santé, ces directeurs de la publication. Mais quand on sera bien saoul, d'être ensemble, entre nous seuls, antillais de cœur ou de corps, on trinquera aussi à Chavez et Ahmadinejad, à Eva Morales, à mes amis du Hezbollah libanais, aux résistants du monde entier qui veulent qu'on leur restitue simplement ou leur terre, ou leur langue et ou leur dignité, ou qu'on leur foutent la paix, à tout ceux qui osent dire non, il y en a quelques uns !

...............Je voudrais que vous sachiez que tout texte à caractère politique que j'ai pu écrire ne l'a été que comme une correspondance publique avec un seul lecteur de MONTRAY qui se reconnaîtra et dont je souhaitais m'attirer l'amitié, mot blasphématoire, aujourd'hui ? Ou pour être précis lui payer ma dette pour le plaisir que j'ai eu à lire ses romans à une époque où ils étaient la seule chaleur humaine dans ma vie hyperboréale. L'a-t-il perçu ainsi, allez savoir ! Ces textes étaient une façon de régler ma dette pour un voyage imaginaire dans un pays de rêves totalement déçus et brisés, mais réels comme jamais dans les-dits romans : la Martinique d'antan ! Mes rêves n'étaient donc pas une lubie, hallucinations ou fourvoiement, je me suis seulement trompé d'époque mais tout a été réparé grâce aux sus-dits romans qui n'ont jamais été pour moi des romans, mais de réelles chroniques de la part de celui qu'on devrait appeler de son vrai nom Amédée Mauville.

 

...............C'est donc en pleine indifférence aux indignations et aux préoccupations de notre monde que je vais vous faire part aujourd'hui de ce qui fut et de ce qui sera l'essentiel de ma vie, ma seule quête, ma seule cause, la Beauté qui peut s'exprimer partout et dans l'art en général.

 

...............La beauté ma seule quête avant que je ne me laisse entraîner à des luttes hors de mon intelligence, la cause des damnés de la terre. Mais aussi par une culpabilité de n'être pas humain dans un monde qui ne l'est pas pourtant. Maintes fois je n'ai écrit que pour ce gugusse par solidarité, pensant faire partie d'une bande de copains à la Georges Brassens, les rédacteurs, bloc-noteurs ou contributeurs de MONTRAY car si j'ai eu parfois la vanité d'être lu, je ne l'ai plus aujourd'hui. Et là je pense aux Sahaï, Boukman, Olsonn, Pépin, Alcide, Constant, Papaya, Bernabé et tous les autres que j'ai jamais vu la pomme d'un seul, sans oublier le cow-boy impossible et caractériel, qui dégaine plus vite que son ombre mais flingue toujours là où on avait rien vu de l'ennemi, là où il a repéré bien avant les autres la connerie, le subterfuge.

 

...............Je vous livrerai un fragment de la beauté, le frisson de l'âme, cette âme qui est le reflet de nos vies sur la surface du Styx. La Beauté qui transcende, celle de l'art « la création de l'inutile. » La beauté, révélation extatique du génie de l'homme et celle naturelle, de la beauté indépendante de l'homme. La beauté est cette communion charnelle et spirituelle avec ce qui pour soi est le plus élevé, le plus digne d'intérêt, ce qui est le plus rare et le plus précieux dans sa vie d'homme. Je vais vous dévoiler où se niche ma véritable sensibilité, une part de mon intimité.

...............Place à la musique et à la danse, mes plus familiers accès à la beauté !

...............L'expérience musicale est tout à fait personnelle. C'est pourquoi elle ne vaut pas pour hiérarchiser les musiques dans la mesure où je n'ai moi écouté pendant 40 ans que de la musique classique et que je m'en tiens à la musique classique celle qui va de Bach à Bartok. Donc pas à Boulez ou Xénakis et les suivants.

...............Certains esprits pourtant éclairés ont hiérarchisé les musiques, celle qui touche le corps, celle qui touche l'esprit, et celle qui touche l'âme. Tout cela est très simplifié et distinguer l'esprit, du corps et de l'âme est hasardeux. Et puis qu'est ce que l'âme ? Sinon la synthèse de tout, l'esprit, le corps, la propre histoire de chacun !

...............Les percussions africaines ou antillaises peuvent toucher l'âme, le corps et l'esprit. Même si je n'en suis pas spécialiste, il m'est arrivé d'avoir quelques émotions à les entendre, bien plus parfois que dans certaines pièces classiques.

...............La musique est un langage particulier que l'on maîtrise ou pas, qui permet de transmettre autant de la poésie qu'un insupportable bruit. Comment juger un langage ? J'ai assisté à une « discussion » entre les tambours parleurs de la chefferie royale du Guana et le Roi de Matouba : les tambours frappaient et le Roi répondait en dansant une sorte de pantomime. Rien ne fut articulé mais le dialogue était là.

...............La musique classique est communément totalement ringarde. En parler vous éloigne l'entourage. D'ailleurs peut-on parler de la musique ? On peut ressentir des émotions mais par la parole il est difficile de communiquer telle ou telle émotion. Je n'en parle jamais d'ordinaire mais je ferai une entorse aujourd'hui à cette règle car cette musique ne s'écoute pas en bruit de fond dans un supermarché. Elle fait appel à la plus disponible des ressources de la sensibilité ; elle est aussi exigeante pour l'esprit parfois. Mais elle touche en retour ce qu'il y a de plus beau dans l'être.

...............La musique classique est qualifiée d' « intello » par des intellos eux-mêmes qui simplement n'ont pas la moindre idée de ce qu'est la musique classique et souhaiterait qu'elle fût d'un effet immédiat pour l'oreille comme certaines musiques telles le reggae, le fado, la salsa ou parfois le jazz et tant d'autres. Mozart est mort à 39 ans, Schubert à 31 ans, ces deux-là ne passaient pas pour des intellectuels y compris de leur vivant. La vérité est que la musique classique ne leur parle pas à ces érudits et c'est tout.

...............Mais il faut reconnaître qu'étant la plus élaborée des musiques, l'oreille doit s'éduquer, la sensibilité n'est pas immédiate. Ce n'est pas une supériorité mais toute musique demande un effort, la musique classique n'est pas la plus facile même si certaines pièces fort connues sont tout à fait abordables sans la moindre culture classique comme le boléro de Ravel, la symphonie 40 de Mozart, l'hymne à la joie de la 9 ème de Beethoven ou l'hymne allemand qui n'est qu'une pièce de Haydn et hélas le va sempiero de Verdi, l'hymne du Front national, comme hélas « la chevauchée des Walkyries » de Wagner dans le film « Apocalypse now » .

............... Je ne ferai qu'ébaucher cette beauté dans la musique dont la quête était ma seule et unique juste cause. Et sera désormais ma seule et unique juste cause ! La vie est courte et je me sens cadavre pour les hommes, c'est tout ! Mais pas encore pour la Beauté ! J'ai dit que la musique était langage elle est donc un mode de reconnaissance des individus.

...............Imaginez que je croise un inconnu, totalement inconnu qui me tient ces quelques mots : «  Allons, l'ami, écouter quelques petites pièces de musique, de Bach le prélude en do majeur , la suite numéro 1 pour violoncelle seul jouée par Pablo Casals et l'aria de la suite numéro 3 ; de Mozart ; 10 mesures des adagios des concertos 18 à 25 , son concerto pour clarinette, la symplonie 39, « Prague » et dans l'opéra « drei jungen Knaben » ou l'air de Tamina de la flûte enchantée, le  « la ci darem la mano » du Don Giovanni ou « voï que sapete » des noces de Figaro et cet air inconnu d'un opéra inachevé, Zaïde « Ruhe sanft, mien holdes Leben  » ; puis l'agnus dei du requiem de Fauré, puis s'il me propose de passer à Schubert les 2 trios pour violon, piano et violoncelle interprétée par le Beaux-arts trio de New-York, la symphonie « la Grande » et l'impromptu opus 35 pour piano ; puis après les danses hongroises de Brahms pour orchestre il m'invite chez Beethoven, la sonate « au clair de lune », le concerto « l'empereur » pour piano interprété par arthur Rubinstein, la sonate du printemps, l'adagio de la 9 ème symphonie ; puis si nous passons à Berlioz et sa symphonie fantastique, puis à Tchaïkovski et sa symphonie « Rêves d'hiver », le premier mouvement du concerto pour violon interprété par Isaac Stern et si, parlant « violon  », il me cite tous les grands violons du siècle passé de Yasha Heifetz à Shlomo Minz, lequel fut le meilleur dans tel ou tel grand concerto, s'il me parle de la Czardas de Monti ou des « airs bohémiens » de Sarasate et de l'âme russe qui est dans le violon russe puis pour finir s'il évoque Shéhérazade de Rimski-Korsakov, la fameuse cavatine de la Norma de Bellini «  casta diva  »et pour conclure me propose d'écouter la symphonie numéro 3 de Gorecki, je lui dirai ces quelques mots en guise de réponse :

...............« Halte-là, camarade ! Vous avez trop parlé. Je sais qui vous êtes et vous savez qui je suis. N'échangerons donc aucun mot. Nous nous parlerons simplement avec le regard, beaucoup plus efficace et à quoi bon parler nous savons tout l'un de l'autre ! »

...............Cet homme–là peut très bien exister mais je ne le rencontrerai jamais. S'il existe réellement il vous dira sans faillir qui je suis réellement, ce qui d'ailleurs n'est pas fondamental. Il vous dira aussi que je suis intouchable, inexpugnable dans cette citadelle musicale . Ce bouquet de morceaux choisis j'aurais pu l'étendre 10 fois plus. Mais cela est suffisant. Pour un très bon musicologue c'est déjà une très bonne carte de visite. Il faut savoir que derrière tout çà il y a des milliers d'heure d'écoute, qu'il ne s'agit que d'une anthologie momentanée, qui peut évoluer mais dont les vertus aujourd'hui sont immédiates, sacrées, un fief intouchable, ma citadelle dans le désert des tartares ou mon rivage des Syrtes.

...............Je n'ai fait qu'ébaucher la musique classique et je vous ennuie déjà. Il ne s'agit pas d'étaler une culture qui sachez le est infiniment partielle car la musique classique est un univers inexploré mais vous devez savoir à quel degré de solitude je me trouve. Cette anthologie n'est pas un herbier de fleurs séchées, elle me fait vivre, mais est un héritage qui tombera en déshérence.

...............Quel est l'effet de la musique ? Elle ne se réduit pas à l'accumulation d'une culture faramineuse, pointilleuse, car ce serait un mauvais calcul : cela n'intéresse personne la musique classique. La musique est de ces nourritures terrestres dont parlait Gide, elle agit comme psychotrope, mais pour être moins médical, elle absout bien des maux, c'est le refuge des dignités bafouées comme ces orchestres de juifs à Auschwitz ou Treblinka. On y puise la sérénité quand le désastre vous encercle. On y puise la force d'agir dans certains allegros vivace et la tendresse interdite dans certains adagios . Par exemple la symphonie rêves, d'hiver dans son adagio, vous oblige à voir tomber de la neige, même sur la Pelée.

...............Le grand avocat Jacques Vergès expliquait récemment non sur ses grands procès mais sur les petits, et avec humilité que tout homme doit être défendu, le pire soit-il ! Je me suis interrogé sur le procès que l'on eût fait à Adolf Hitler s'il ne s'était pas suicidé. Pas pour les raisons que l'on croit. Même si je viens d'acheter « la bibliothèque d'Adolf Hitler » ! Je veux comprendre ! Mais là où je ne comprends pas du tout c'est comment un homme qui a assisté à la représentation au Philharmonique de Berlin, dans les années 40, de la 9 ème symphonie de Beethoven, dirigée par Wilhem Furtwangler, et qui, entouré des Goebels, Goering, Ftitz, enfin ils y étaient tous, comment cet homme entendant l'adagio, le 3 ème mouvement, plein de douceur, de bonté, de finesse dans les pizzicati des violons, ce mouvement plein d'amour pour l'humanité comment cet homme pouvait à l'instant même ne pas éprouver une gêne, un début de doute, une ébauche de remords vis à vis de ces desseins ignobles. En quoi par ailleurs la 9 ème de Beethoven et le poème de Schiller du 4 ème mouvement, le fameux Hymne à la joie servaient-ils le nationalisme allemand ?. Plus généralement tous les dignitaires nazis étaient de grands amateurs d'art, c'est par trains plombés qu'ils on pillé l'Europe, surtout les juifs. Comment « une telle race inférieure a-t-elle pu accumuler autant de chefs-d'œuvre ? » Comment Goebels pouvait-il expliquer cela ? Dans l'URSS ce fut pareil. Staline est allé voir 17 fois le lac de Cygnes de Tchaïkovski. Il y a dans cette musique pour ballet, une valse qui ne vous conduit pas à des déportations au goulag, ce n'est pas possible ! Et s'il y avait l'art officiel et l'art décadent, dans leurs datchas privées, les dignitaires du parti, possédaient la quintessence de l'art décadent, l'art tout simplement, des impressionnistes et tant d'autres. Les nazis et les communistes avaient des goûts sûrs en art. Prostitution démoniaque de l'art qui n'est au service de personne, pas d'une politique ni d'une ambition encore moins d'une idéologie.

...............Car je suis convaincu que la beauté que l'on puise dans l'art conduit à l'amour et je ne suis pas le seul : Yéhudi Ménuhin, Mistlav Rostropovich, Daniel Barenboïm et tant d'autres grands interprètes ou chefs d'orchestres, étaient de grand humanistes. Et que dire des musiques : l'orchestre Philharmonique de Berlin, le meilleur au monde, interprétant en 1989, la musique des Pink Floyd, the Wall, à l'occasion de la chute du mur.

...............La Beauté n'a d'autre but qu'élever l'âme et rendre meilleur, plus généreux. Mais la Beauté ne se raconte pas, s'exprime difficilement car elle est justement la part intime de soi, intraduisible, intransmissible. Tous les philosophes l'ont fait, je vais pas jouer les morpions en m'essayant à un traité d'esthétisme. Non je révèle un peu de moi même, simplement et j'en viens à la danse prolongement de la musique.

...............La danse met en valeur la musique par la gestuelle elle associe deux sensations l'une auditive, l'autre visuelle en donnant au corps humain tout le branle que permet la musique. Il y a dans ce domaines forte variété. Et la aussi pas de hiérarchie à faire. Les danses zoulous et africaines au son des tam-tams prennent parfois des effets de transe d'une sensualité, d'un érotisme puissant difficile à laisser indifférent. J'ai vu de jeunes martiniquaises de 12 ans s'adonner au cours d'un vidé à ces démoniaques chorégraphies. Il fallut tête froide garder.

...............Mais là encore toute la beauté je l'ai trouvée dans la danse classique avec les corps de ballet russes ou français. J'avais ma loge à l'opéra de Paris. En clair je partais en mission selon le calendrier opéra et danse du Palais-Garnier à Paris, celui dont le grand peintre russe Chagall a peint le plafond avec des parfums de scandale. J'en ai vu défiler des danseuses étoiles, comme Marie Claude Pietragalla, l'étoile corse, brune, inhabituelle qui par la suite s'est exprimée dans des chorégraphies plus modernes comme celles de Carolyn Carlson. D'ailleurs la danse moderne a beaucoup fait évoluer cet art que l'on disait guindé. Béjart n'y est pas pour rien. Et je l'avoue être allé voir tranquillement du Béjart à Bastille et avoir fini ma soirée par les tableaux du Crazy horse où nul costumier n'apparaît sur le programme, le nu peut être beau, dans la gestuelle, dans des chorégraphies élaborées avec des jeux de lumière et des musiques adaptées, je pense qu'un rapport sexuel peut être aussi empreint d'esthétisme dans la danse des corps là où la vulgarité n'est pas.

...............Mais j'ai surtout vu défiler les étoiles, danseuses, premières et secondes du Bolchoï, du Kirov. Comme Aurélie Dupond, la divine dont tout analphabète en danse classique tombait obligatoirement amoureux, à voir son portrait ou Claire marie Ostie, que j'avais repérée, seconde danseuse, mais si éblouissante que je n'ai pas hésité à lui envoyer des lys à la fin d'un spectacle et des mots enfiévrés, puis à un autre où elle était finalement malade et remplacée et où je lui ai juré avoir passé 2 heures à contempler le plafond de Chagall en raison de son absence. Mais 3 ans après Claire-Marie Ostie était danseuse étoile de l'Opéra. Là encore le goût s'éduque. La Beauté se mérite ; elle n'est pas un plaisir facile et immédiat. Ce n'est pas une raison pour qualifier le classique d'intellectuel. Tout est intellectuel ou rien ne l'est. Mes rêves de femme d'adolescent étaient ces danseuses slaves, aux yeux gris, fines et tristes. Comment en vient-on à la beauté noire ? Posez la question à Picasso si vous le croisez. Tout semble académique dans la danse classique. Pourtant je peux être ému par un pas de deux, où l'élégance, jusqu'à la pointe des doigts, l'incurvé d'un cou, le symbolisme tout est harmonie et volupté.

...............J'ai vu récemment la Bayadère sur une chorégraphie de Marius Petipa qui a révolutionné la danse russe, mieux que Georges Marchais ou Maurice Thorez. Il y a toute une série de tableaux classiques mais la danse orientale, seule , de l'étoile du ballet de Saint Pétersbourg, accompagnée d'un seul violoncelle puis vers la fin par une dizaine de violons, était d'une sensualité et d'une beauté que je n'avais jamais vue de ma vie. L'assistance était subjuguée. Pas trop de loubards, ni de crack qui circulait dans cette assistance mais uniquement des personnes qui connaissaient bien cette Bayadère et ne venaient que pour voir l'étoile russe. Et pas déçue, non.

...............Et ce bonheur, certes éphémère, vous relativise tous les soucis de la vie et vous donnent une sorte de chemin à suivre, une morale, fuir la médiocrité de l'homme, de ce monde et traquer la beauté seule. Et cela est désormais un ordre transcendantal, un choix à faire : se ruiner la santé, s'élimer la peau aux tracas de ce monde ou travailler, éduquer son esprit à la Beauté dans tous les domaines. Musique, danse, peinture, littérature, poésie, théâtre tout classiques, la vie est courte et l'art est vaste.

...............Moi j'ai fait un choix irrémédiable. Je suis en tout autodidacte n'étant pas issu d'un milieu où l'art avait la moindre place, n'ayant jamais fréquenté ou si peu les artistes mais mes choix étaient là depuis mon enfance, je veux aujourd'hui y consacrer le reste de ma vie et tant pis si mon existence se situe au XIXème, tant pis si je ne suis plus avec ferveur l'actualité du monde, si je deviens indifférent au bordel sans nom qu'il est devenu, je retourne dans mes terres, studieux dans l'étude du goût et de l'art. Il sera difficile de m'en faire sortir car je ferai des efforts pour ne plus réagir de façon immédiate et épidermique à l'injustice même si cela doit me coûter, canaliser sa sensibilité, non aux maux du monde mais à la quête inlassable de la beauté et donc quelque peu indifférent à l'espèce humaine !

...............Entre-tuez vous, j'en ferai un sonnet.

Thierry Caille


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