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Retour à l’école : les enseignants ne lâchent rien

Yves-Léopold MONTHIEUX
Retour à l’école : les enseignants ne lâchent rien

"Je ne peux dire d’emblée que nous ne pourrons pas le faire car « difficile ne veut pas dire impossible", d’une part. D’autre part, …"pour toutes ces raisons, la date du 11 mai ne me semble pas envisageable. Pour autant, il nous faut dès aujourd’hui commencer à travailler à la réussite de la prochaine rentrée scolaire". Réveillons-nous, car nous sommes en Guadeloupe ! Ce sont les paroles de Mme BOREL-LINCERTAIN, présidente du conseil général de Guadeloupe, puis de celles de Ary CHALUS président du conseil régional. On en est loin en Martinique.

L’un des souvenirs les plus forts que quittera chez nous la pandémie du covid-19 sera très certainement la controverse nourrie qui, une fois la période de déconfinement annoncée, aura concerné la date d’ouverture des écoles publiques. Cette calamité avait été précédée d’une autre calamité : la plus longue grève des maîtres et maîtresses d’école de la Martinique. En effet, souvent estimé comme étant entièrement à part, ce territoire s’est révélé le chef de file de la contestation en outre-mer, et ses petits soldats syndicalistes, les fers de lance de la grève contre la réforme de la retraite, en France. Cette diligence n’allait pas servir à grand-chose sinon à éloigner les enfants de l’école depuis le milieu du mois de décembre 2019, pour certains. Bref, il ne faudrait plus en parler d’autant plus que les représentants des parents d’élèves ont étroitement adhéré à ce mouvement de grève prolongé, jusqu’à souvent descendre dans les rues pour porter mainforte aux enseignants. Cette caution parentale avait rendu inaudibles les rares mères de famille qui, inquiètes pour l’année scolaire de leurs enfants, avaient eu l’audace d’exprimer cette inquiétude.  

La date du 11 mai, aussitôt annoncée aussitôt rejetée.

Est alors arrivée la pandémie dont la gravité et l’étendue allaient faire oublier la mise en jachères de nos petits cerveaux, qui allait pourtant se prolonger jusqu’à la fin du confinement. Ce moment a été fixé au 11 mai, mais 22 jours avant cette date, le monde enseignant et les élus ont fait connaître leur sèche opposition à cette décision. Une opposition de principe, dès lors qu’elle n’a été précédée d’aucune discussion. Depuis, les maires puis les élus territoriaux y ont apporté le poids de leur refus.

Le feu fut ouvert par le maire du Prêcheur qui accompagna son refus d’un appel à la concertation adressé au Président de l’association des Maires, un machin dont on s’est toujours interrogé sur son utilité. S’estimant peut-être à l’étroit dans sa commune, le bouillant maire du Prêcheur a peut-être des idées pour l’ensemble du territoire. Le maire du Lorrain s’en est implicitement détaché en annonçant de façon unilatérale que les écoles de sa ville ne seront prêtes et mises à la disposition des enseignants que le 18 mai 2020. Par ailleurs, l’initiative de Marcellin Nadeau a été rendue caduque par l’invitation du président de la CTM qui, à son tour, fit appel aux élus.

Un terrain d’expérimentation : la commune du Prêcheur

De par la situation de sa ville, bordée par la mer et la montagne, et dont l’accessibilité par la route est unique, Marcellin Nadeau qui n’est pas avare d’initiatives, a sans doute manqué une occasion de proposer que le Prêcheur soit un terrain d’expérimentation. Ce territoire communal doté d’une faible population pourrait faire l’objet d’un confinement global et d’un usage des tests qui permettraient de quasiment faire disparaître la contagion dans cette ville. Et faire en sorte de servir un meilleur confort à la population, la scolaire d’abord. Il n’est pas besoin d’entrer dans les détails d’une opération qui pourrait se dupliquer à l’entrée de Basse-Pointe pour l’ensemble des 3 communes du grand nord. Au moment où, ailleurs, les solutions sont discutées où expérimentées sans attendre le 11 mai, ce projet pourrait être un point lumineux dans la grisaille de l’immobilisme ambiant.

Bien entendu, le non intégral avant toute concertation, des uns et des autres, participe de ce négativisme des enseignants dont le refus de rejoindre l’école pour fait de grève se prolongerait résolument jusqu’à l’extinction de l’année scolaire. Donné comme majoritaire dans l’opinion, c’est le seul son de cloche entendu par la population, auquel la prompte adhésion des élus ne s’est pas fait attendre.

Le négativisme des élus et des syndicats

Un responsable des parents d’élèves a été jeté aux gémonies. Il avait estimé que les enfants étaient trop longtemps restés éloignés de l’école et avait voulu prendre ses distances par rapport aux syndicats d’enseignants, peu habitués à l’indocilité des représentants des parents d’élèves. Deux citoyennes qui ont osé en appeler à la solidarité des enseignants se sont vues assener une volée de bois vert sur les réseaux sociaux, histoire de dissuader d’autres de toutes velléités de contestation. Une journaliste qui a voulu s’élever du mou consensus médiatique a pratiquement été invitée à s’occuper de ses affaires. Enfin, la sénatrice Catherine Conconne, très républicaine depuis quelques temps, a osé rompre l’atmosphère négativiste entretenue par les élus et les syndicats. Elle a mis en lumière les conséquences, en termes d’inégalités sociales et d’incertitudes quant à une clarification de la situation sanitaire en septembre prochain. Sauf que l’intrusion d’une dose de politique politicienne a fini par opposer la parlementaire à un journaliste parfaitement ouvert à ses propos. C’est peu dire qu’elle n’a pas bénéficié dans cette affaire, comme dans d’autres, un soutien remarqué de son parti ou de son camp politique. Bref, on l’a vu encore lors de l’épisode l’eau, les chamaillages politiciens n’ont pas attendu le covid-19 pour s’exprimer.

Une répétition générale de la rentrée de septembre ?

Toutes ces interventions qui relèvent du bon sens et de l’intérêt des enfants ont estimé que la reprise de la scolarité à partir du 11 mai 2020 pourrait à tout le moins servir de répétition générale en vue de la rentrée de septembre prochain. Par ailleurs, de l’avis de tous les spécialistes, rien n’indique que la situation sanitaire sera de façon significative différente de celle du 11 mai.

Au moment où s’écrivent ces lignes, les enseignants semblent avoir gagné la partie. Ils ont reconduit, intacte, la détermination pratiquée au cours de la grève contre la réforme de la retraite française, qu’ils ont menée à leurs conditions. Certains parents sont même accusés de vouloir transformer l’école en mouroir ou en garderie afin de leur permettre d’aller travailler. Cette préoccupation paraît indigne aux yeux de ces distingués professeurs. Qui ne voit qu’une meilleure volonté des enseignants servirait d’entrain aux élus et au reste de la collectivité ? Peu importe, en effet, que de nombreux travailleurs français, y compris martiniquais, ont hâte de retrouver leurs emplois pour être payés. D’autres qui peuvent rester 8 mois à la maison sans perdre leurs salaires ne comprennent pas une si modeste ambition.

Fort-de-France, le 27 avril 2020[1]

Yves-Léopold Monthieux

 




[1] Anniversaire de la date d’abolition de l’esclavage, en Martinique, le 27 avril 1848.

 

Commentaires

Véyative | 29/04/2020 - 06:05 :
Je crois bien que les enseignants ne veulent plus enseigner,. Ils sont toujours "contre" et ne sont jamais une force de proposition. Et dieu seul sait la litanie de " je suis contre " qu'on entendra pendant longtemps encore : la rentrée en septembre, les rythmes scolaires, les propos du recteur, ... etc, bref le marathon a commencé. Pendant ce temps de nombreux travailleurs courageux , assurent le quotidien.
Frédéric C. | 29/04/2020 - 19:29 :
Sans trop entrer dans le détail de l'article de Monthieux, qui soulève certes des problèmes qu'on ne peut pas régler par un coup de baguette magique, il y a quand même quelques éléments qui nuisent à sa crédibilité si on recontextualise complètement la situation: 1/ L'OCCULTATION DU CONCOURS DE CIRCONSTANCES ET DU CONTEXTE "PRE-CONFINEMENT". La grève contre la réforme des retraites n'a pas été suivie que par dans le corps enseignant: c'était une grève interprofessionnelle, DONC salariés du public et du privé, et elle fut suivie aussi par des non-salariés. Cette grève visait à refuser que le système de retraite actuel (dit "par répartition") soit remplacé par un système "à points", donc individualisé, où, une fois l'âge de la retraite arrivée, beaucoup de gens toucheraient beaucoup moins que dans le système actuel. Les femmes et les titulaires de salaires modestes, les "temps partiels" (parfois imposés par les patrons), les personnes passées par de longues périodes de chômage seraient particulièrement frappés, et y perdraient énormément. Donc décrire cette grève comme purement "d'enseignants" est malhonnête, et montre les enseignants du doigt… Par ailleurs, si cette grève interprofessionnelle a précédé le confinement, cela n'a pas été planifié par les grévistes, c'est un pur concours de circonstances. Donc là aussi c'est malhonnête. C'est désigner le corps enseignant comme bouc émissaire. (Bon sang, où avez-vous caché le stock d'étoiles jaunes?). 2/L'AMALGAME. Monthieux dit "les enseignants", "les syndicats". Outre ce qui est dit ci-dessus, faut-il vous rappeler, M.Monthieux, que les enseignants ne sont pas tous en grève, qu'ils ne sont pas une "masse" homogène? Faut-il aussi vous rappeler que les syndicats ne sont pas tous d'accord sur "grève ou pas grève", ce que votre connaissance de la vie publique martiniquaise depuis longtemps aurait pu vous permettre de comprendre? Quid de cet antisyndicalisme qu'on pourrait qualifier de "primaire"? Faut-il à vos yeux réprimer voire interdire les syndicats indépendants et le droit de grève? Si oui, et si vous avez prévu de voter aux élections présidentielles de 2022, vous aurez au moins un(e) candidat(e) d'extrême-droite pour le faire savoir dans les urnes: l'extrême-droite a toujours voulu écraser les syndicats indépendants du patronat (le patron fût-il l'Etat) et briser le droit de grève des salariés…. C'est embêtant, M.Monthieux, il semblait que vous aviez plus de discernement sur ces points de la chose publique….. 3/ Dernier élément, et là c'est impardonnable! la date commémorant la fin de l'esclavage en Martinique est le 22 mai (1848), date de l'insurrection ayant abouti à l'ARRÊTE GUBERNATORIAL (du Gouverneur, sur place) le 23 mai 1848 (suite à l'insurrection du 22: cf travaux d'Armand Nicolas, confirmés par les historiens qui ont suivi). Le 27 avril, c'est la date anniversaire du décret d'abolition de l'esclavage en Martinique, qui était censé ne s'appliquer que deux mois après sa promulgation dans la colonie, donc après le 27 juin 1848. Or, quand cet arrêté est arrivé en Mque, les esclaves mquais s'étaient déjà libérés par eux-mêmes. Alors SVP, M.Monthieux, ne faîtes pas EN PLUS dans le révisionnisme historique sur l'histoire de la Martinique. Certains militants anticolonialistes martiniquais ont payé très cher pendant les années 1960 et 1970 pour rétablir la vérité historique du point de vue des anciens esclaves. SVP respectez ces militants. Merci.

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