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REPENSER LES « ÉTUDES CRÉOLES » (6ème partie)

REPENSER LES « ÉTUDES CRÉOLES » (6ème partie)

Depuis que j’ai commencé cette chronique — qui en est à sa sixième livraison —, je reçois remarques, critiques ou suggestions de nombreux créolistes ou simplement de personnes intéressées par le fait créole. Qu’elles en soient remerciées ! C’est l’objectif que je m’étais fixé au départ : susciter un débat et sortir du ronron dans lequel se complaisent les « Études créoles » depuis trop longtemps. Mais il est vrai que certains, enferrés tantôt dans un scientisme borné tantôt dans un idéologisme forcené, récusent radicalement la démarche que je propose. C’est tout à fait leur droit. Pour ma part, je persiste et signe : nous avons fait de la science (pour certains) et de l’idéologie (pour d’autres), parfois les deux à la fois, pendant les trente dernières années. Il y a eu beaucoup de positif dans tout cela. Le combat pour la défense et illustration du créole a énormément progressé. Mais, à mon sens, l’heure est venue d’aller plus avant car n’importe quel observateur honnête peut constater que nous faisons désormais du sur-place. Jusqu’ici j’ai surtout posé des questions au plan scientifique, mais à un moment où un autre, il faudra s’intéresser aussi au plan idéologique. Nos idéologues du créole auront-ils le courage, par exemple, de reconnaître qu’ils ont été pour beaucoup dans l’actuel processus de décréolisation ? Car il est toujours facile d’en faire porter la responsabilité à l’État français, au colonialisme ou à l’assimilation, sauf qu’avec la libération des ondes en 1981 et la création des radios-libres, on a vu apparaître dans nos pays des radios partiellement ou entièrement créolophones utilisant un véritable charabia que, pour ma part, j’appelle le « charabiais ». À l’époque, il n’y avait pas encore 20 ou 30 chaînes de télé comme aujourd’hui et le grand public a vu dans ces radios une véritable bouffée d’oxygène et les a plébiscitées. Pendant plus de deux décennies, ces radios (hormis RLDM) ont imposé le charabiais. Du genre : « An ka pansé {{ke}} fon ou chanjé {{dè}} sistem etc. ». Cette novlangue, matraquée à longueur de journée, a fini par pénétrer dans la tête des locuteurs, surtout les plus jeunes, contribuant à renforcer le processus de décréolisation. Des gens de bons sens, des locuteurs âgés le plus souvent, en étaient révulsés : « {Simié sé mésié palé fwansé olié yo dérayé kréyol-la !} » (Il vaut mieux que ces gens parlent français au lieu de démolir le créole !). J’ai de forts doutes quant à la capacité de ces charabiophones, tous nationalistes (!), à reconnaître leurs torts dans ce domaine, déjà qu’ils se refusent à admettre leur responsabilité dans l’impasse dans laquelle, ils ont conduit le mouvement indépendantiste dans nos différents pays. Nous y reviendrons…

Certains me demandent, à juste titre, en quoi consiste exactement cette refondation que j’appelle de mes vœux et surtout la « philosophie créole » dont j’estime que le moment est venu de la mettre en place. Disons tout d’abord que si j’ai jusqu’à présent utilisé les termes « créolistique » et « Études créoles » comme des synonymes, c’était par commodité de langage. En fait, la première opération à laquelle nous devrons procéder est d’établir un distinguo entre ces deux notions, certes apparentées. La créolistique, en effet, est une branche de la linguistique, tout comme la germanistique ou la slavistique, qui s’intéresse d’abord et avant tout à la langue créole. Si elle n’ignore pas les aspects sociétaux de la pratique linguistique (ce à quoi s’occupe la sociolinguistique) ou psychologiques (ce à quoi s’occupe la psycholinguistique), elle s’est plutôt penchée à ce jour sur la phonologie, la syntaxe et le lexique du (/des) créole (s). En cela, elle a devancé l’étude anthropologique, sociologique ou psychologique des sociétés créoles puisqu’elle date, rappelons-le du XIXe siècle avec le linguiste allemand Hugo Schuchart. En un siècle et demi, la créolistique a ainsi abattu un travail de recherche considérable, devenant même dans les années 70-80 une sorte de phare, de pointe avancée de la linguistique mondiale, qui voyait dans la jeune langue créole un moyen d’étudier quasiment in vivo la naissance d’une langue, chose difficile pour les très vieilles langues (araméen, hébreu, grec ancien, arabe, sanscrit, latin etc.) ou les langues assez anciennes (français, espagnol, italien, allemand, russe, anglais etc.). Pour une fois, on disposait, dans le cas du créole, d’une masse assez considérable de documents écrits qui permettait de comprendre comme ce nouvel idiome avait pu émerger dans le sillage de la conquête des Amériques. Ces documents, par exemple, nous indiquent le mode de vie des premiers habitants des îles, les Caraïbes, d’où provenaient les premiers colons français (devenus « Békés » par la suite), quelle était l’origine des différentes cargaisons d’esclaves, comment ces derniers étaient parqués des mois durant dans les « {baracoons} », ces sortes d’entrepôts établis sur les côtes d’Afrique de l’Ouest. Ils nous renseignent bien évidemment sur l’esclavage et la vie sur les « habitations » et cela dès les premiers temps, c’est-à-dire la première moitié du XVIIe siècle. Le problème est que les questions langagières, on s’en doute bien, n’étaient pas au centre des préoccupations de ceux qui écrivaient (/savaient écrire) à l’époque et qu’on ne trouve chez les chroniqueurs, souvent ecclésiastiques, que des remarques incidentes à propos des différentes langues en présence, de leur mélange et de la lente émergence de formes linguistiques inédites : c’est le cas de ce fameux et mystérieux « baragouin », signalé, entre autres par les Pères Breton et Dutertre, qui nous est présenté comme un sabir qu’utilisaient les Caraïbes, d’abord avec les Espagnols, puis avec les Français, et que certains linguistes considèrent comme l’ancêtre ou plutôt le soubassement du créole actuel. Signalons tout de même l’étonnant « Dictionnaire caraïbe-français » (1665) du Père Breton, réédité par le CELIA, le GEREC et l’IRD en 1999.

La créolistique est donc une discipline à prétention ou vocation scientifique, bien balisée, possédant ses méthodes d’investigation, ses concepts et ses théories (souvent opposées). Il convient donc, à mon sens, de la distinguer de ce qu’on pourrait appeler les « Humanités créoles » et que je préfère appeler, moins joliment, « Études créoles ». Si la première expression est plus parlante, elle est parasitée par les expressions « Humanités classiques » ou « Humanités gréco-latines » qui renvoient à un monde où l’individu en était venu à occuper, progressivement, une place centrale. Elle fait référence bien évidemment à « l’honnête homme » européen du XVIIe siècle, censé posséder une culture (ou un vernis) de culture gréco-latine. Appliquer cette expression, « Humanités » à l’univers déshumanisé, durant des siècles, des « colonies françoises d’Amérique », relève au mieux de l’humour douteux, au pire de l’incongruité. En effet, comme chacun sait, la majorité de la population entre le début du XVIIe siècle et le milieu du XIXe n’était pas considérée comme faisant partie du genre humain, mais du monde animal ou alors de celui des choses que l’on vendait soit comme du bétail soit comme des meubles. Exit donc « Humanités créoles », aussi magnifique soit cette expression.

En quoi donc les « Études créoles » se distinguent-elles de la créolistique ? Je devrais plutôt dire « en quoi elles devraient » car la confusion est sciemment entretenue par certains justement dans le but de ne pas avoir à dépasser les questions techniques, censées être abordées scientifiquement et donc en dehors de toute idéologie politique. Pierre Bourdieu, entre autres, a mis à mal cette prétention de la linguistique à concevoir la langue et donc le sujet parlant comme des entités neutres que l’on peut étudier sans faire la moindre référence à l’environnement social et politique dans lequel ils évoluent. Il n’y a guère, en effet, que dans le domaine très étroit de la phonétique et de la phonologie que pareille chose est concevable. Dès que l’on aborde les autres domaines du langage (le lexique, la syntaxe etc.), on ne saurait ignorer les données historiques, anthropologiques, sociologiques et psychologiques (voire même psychanalytiques). La créolistique étant une branche de la linguistique ne saurait, elle non plus, y échapper. Mais, soyons honnêtes, de toutes les branches de la linguistique, c’est quand même la créolistique qui a le plus pris en charge lesdites données. Sauf que — et c’est là l’objet de ma présente chronique —, il lui faut à présent monter encore d’un cran. Il lui faut élaborer une pensée du fait créole ou une philosophie créole. Cela n’a jamais été vraiment tenté jusqu’à présent, même si des auteurs tels qu’Édouard Glissant ou Monchoachi ont ouvert des pistes fort intéressantes. Nous l’avons vu, les créolistes universitaires n’ont malheureusement jamais réussi à établir un dialogue avec ces penseurs, chose qui aurait permis d’un côté, à ces derniers de nourrir leurs textes d’un vrai savoir linguistique (et non d’une simple vision poétique ou poétisante de la langue) et d’un autre côté, aux créolistes, de sortir de leurs disciplines étroites pour envisager une réflexion de type philosophique. Mais il n’est pas trop tard. L’œuvre de Glissant est là malgré la disparition de son auteur, elle nous interpelle dans ses fulgurations et ses ouvertures géniales et il est tout à fait possible, de manière bien évidemment critique, d’entamer avec elle le dialogue en question. Les textes de Monchoachi également sont d’une richesse étonnante et ébranlent nos certitudes.

Car il est tout de même rageant de constater qu’alors même que les langues créoles sont nées de la première mondialisation (celle inaugurée par la conquête des Amériques), les créolistes n’aient pas été en première ligne pour étudier la deuxième mondialisation (celle que nous vivons aujourd’hui). Une fenêtre fut toutefois ouverte, en 1989, avec la publication de l’ « Éloge de la Créolité », mais tant pour le public cultivé que le grand public, cette tentative de penser la relation entre monde créole et mondialisation a été — et continue d’être — perçue comme la seule défense de la langue et de la culture créoles. Ce qui n’est absolument pas le cas. Il est vrai que les auteurs de ce manifeste n’ont pas, pour nombre de raisons, poursuivi leur réflexion plus avant et n’ont pas, notamment, cherché à développer ce potentiellement fructueux concept qu’est la « diversalité ». Cette dernière, contrairement à ce que croient certains lecteurs hâtifs ou mal intentionnés, n’était point un rejet du concept d’universalité, ce qui serait absurde. La diversalité s’est, en fait, employée à déconstruire, à la suite de bien d’autres mouvements de pensée, l’universalité telle qu’elle fut élaborée en Europe disons à partir de Descartes (« La raison est la chose au monde la mieux partagée »). C’est que ladite raison n’était, en réalité pas si partagée que cela puisqu’on déniait aux « Sauvages » des Amériques, aux Africains, voire aux Arabes et aux Asiatiques. Du coup, l’universalité faisait de l’Homme Européen le parangon de l’Humanité, et devenait le masque, le cache-sexe, de son entreprise de conquête généralisée de la planète. Généreux dans son fondement philosophique, l’universalité s’est révélée historiquement — et donc dans la pratique — une arme de destruction massive de l’Autre. De tout ce qui différait de l’Europe et de l’Occident. Continuer donc à utiliser naïvement le vocable « universalité » revient à se soumettre en quelque sorte à l’idée de la supériorité occidentale sur le reste du monde. Bref, les auteurs du manifeste de la Créolité, en proposant la notion de « diversalité » entendaient sortir de ce piège, mais la réflexion n’a pas été poussée plus avant. Il aurait fallu, notamment, mieux la différencier du multiculturalime qui est devenu la tarte à la crème de la plupart des discours sur la mondialisation/globalisation alors même qu’il s’agit d’une forme d’apartheid inventé aux USA, un apartheid « {soft} » ou à visage humain. Dans l’apartheid « {hard} », celui de l’ex-Afrique du Sud, les groupes ethniques étaient radicalement séparés alors que dans l’apartheid multiculturaliste, on a affaire à une juxtaposition résidentielle des groupes en question accompagnés de lieux précis où ils peuvent momentanément frayer : entreprises, stades, cafés, festivals culturels, etc. Il convient donc de reprendre de toute urgence ce concept de « diversalité » à l’heure où, en Occident, depuis Francis Fukuyama, certains théorisent une prétendue « guerre des civilisations ». Autre problème : les auteurs du manifeste de la Créolité, avait une méconnaissance des mouvements de pensée apparus dans la Caraïbe anglophone hispanophone. Je pense évidemment au « {Criollismo} » cubain, cette revendication d’autochtonie des Blancs créoles cubains face aux Espagnols au XIXe siècle, qui conduisit à la lutte pour l’indépendance de la grande île et que l’on peut considérer comme la version « blanche » de la Créolité. De même que le « {mestizaje} » ou « mulâtrisme », toujours dans la sphère hispanophone, renvoie à une manière de Créolité mulâtre c’est-à-dire promouvant l’idée d’un métissage généralisé plutôt pervers puisqu’en arrière-plan, il renvoie à l’idée de dilution (et donc de disparition) du groupe noir dans le groupe blanc. Si les auteurs du manifeste de la Créolité s’étaient penchés sur ces deux mouvements de pensée, sans doute auraient-ils pu positionner leur « Éloge » comme le dépassement dialectique de la Créolité blanche et de la Créolité mulâtre vers une Créolité non pas « nègre », mais non raciale ou post-raciale. Autre méconnaissance : celui des penseurs anglophones du « {Transnationalism} », notamment indiens et caribéens. Ces derniers étudient ce phénomène nouveau et grandissant qu’est l’apparition de « communautés transnationales » tels que les « Indiens d’Outre-mer » (comme on dit en Inde), les « Chinois d’Outre-mer » (comme on dit en Chine) ou la « diaspora caribéenne ». Car il y a, par exemple, une proximité de destin entre les millions d’Indiens dispersés à travers le monde : Malaisie, Singapour, pays arabes du Golfe, Corne de l’Afrique, Guadeloupe, Martinique, Trinidad, Guyana, Surinam, Canada, etc. Il y a surtout une nouvelle manière de penser l’indianité entre le « pays rêvé » (l’Inde), celui des ancêtres donc, et le « pays réel », celui où on est et se sent définitivement installé. Chassés de l’Ouganda par Amin Dada, les dizaines de milliers d’Indiens qui s’étaient installés dans ce pays dans le sillage de la colonisation britannique, ont choisi pour la plupart de se réinstaller en… Angleterre ou au Canada et non en Inde, tout en conservant et cultivant un fort sentiment d’indianité et en vénérant « la terre sacrée », celle où coule le Gange. On a là un parfait exemple de communauté (et d’identité) transnationale que les créolistes auraient eu tout intérêt à étudier et à méditer s’ils n’étaient pas enfermés dans leur petite calebasse franco-créolophone.

Il aurait fallu aussi déconstruire la notion d’« Occident » en s’appuyant sur l’idée de Glissant selon laquelle il ne renvoie plus seulement à une région du monde, mais à un mode de pensée, les élites dirigeantes des pays du Sud partageant très largement les idées, le mode de vie et les croyances des Occidentaux alors que, dans le même temps, en Europe et aux États-Unis, se créent des poches de Tiers-monde, ce qui brouille du coup la frontière si radicalement évoquée entre Occident et reste du monde. Il aurait fallu — et ce n’est qu’un exemple — mettre à la question cette idée de « racines chrétiennes de l’Europe », parfois modulée en « racines judéo-chrétiennes de l’Europe », en rappelant les travaux de maints médiévistes qui démontrent que sans l’apport intellectuel arabe (et la traduction qu’il a faite de la philosophie grecque à une époque où l’Europe médiévale avait perdu contact avec cette dernière), la pensée européenne n’aurait jamais pu devenir ce qu’elle est. Alain de Libéra, dans {Penser au Moyen-âge} (1991) écrit ainsi :

« Comment le discours universitaire est-il né ? Il n’est pas né de lui-même, mais il a été appris, intériorisé, adapté à partir de sources précises : la conception philosophique formulée par les philosophes de terre d’Islam, premiers héritiers médiévaux de la philosophie grecque. »

En fait, les créolistes natifs ont fait preuve de timidité conceptuelle, hormis bien sûr dans leurs disciplines particulières (linguistique, sociolinguistique, anthropologie etc.), parce que beaucoup craignaient, en s’aventurant sur le terrain de la philosophie, de n’être plus considérés comme « scientifiques » par leurs collègues créolistes non natifs. C’est que ces derniers, en dépit de la petite révolution qui s’est opérée à Sainte-Lucie en 1981 et que nous avons déjà évoquée dans une précédente chronique, révolution qui a permis aux chercheurs natifs de s’asseoir à la table de la créolistique à l’égal des chercheurs non natifs, continuent par le biais de leurs revues, de leurs groupes de recherche, de leurs universités et des moyens financiers dont ils disposent, à dominer la discipline. Le cas le plus dramatique est celui de l’île de la Réunion où la créolistique a été carrément accaparée par des non natifs, sans doute compétents, mais non intéressés, voire hostiles, à toute forme de pensée sortant un tant soit peu des clous universitaires (ceci pour des raisons politiques inavouées). Cette domination a empêché l’éclosion d’une vraie pensée du fait créole réunionnais et l’émergence de penseurs d’envergure mondiale tel que le Martiniquais Édouard Glissant (le mouvement de la « Créolie » de Jean Albany et de l’évêque Aubry n’ayant jamais dépassé, à ma connaissance en tout cas, les frontières de la Réunion). Cela est bien dommage car s’il y a un pays créolophone où la langue et la culture créoles sont vivaces, c’est bien l’ancienne île de Bourbon, véritable miniature du monde globalisé avec des populations d’origine européenne, africaine, indienne, chinoise et arabe en nombre quasiment égal (rien à voir avec la Martinique où nous n’avons que 3.000 Blancs créoles soit à peine…1% de notre population ou 5.000 Indiens, soit 5% de celle-ci). La Réunion (et sa sœur Maurice) est donc le lieu idéal pour penser les phénomènes de créolisation et de mondialisation Or, par la faute de certains créolistes non natifs déterminés à préserver leur pré carré universitaire et leurs petites disciplines académiques bien balisées, secondés en cela par des créolistes réunionnais ou d’autres pays créolophones, on n’y a pas encore vu apparaître une pensée forte et originale du fait créole qui serait susceptible de rivaliser avec les grandes théories élaborées ailleurs ({Post-colonial Studies}, {Subaltern Studies}, Transculturation, Créolisation, Créolité, Transnationalisme, etc.). Cela ne sera possible que le jour où les créolistes réunionnais natifs, souvent brillants, se débarrasseront une fois pour toutes de la tutelle de cette camarilla de créolistes non natifs et natifs d’autres pays créolophones qui ont traité leur île, sa langue et sa culture, comme une sorte de fromage leur permettant d’assurer leur carrière académique.

Il est donc temps pour nous de passer de la simple créolistique à la pensée du fait créole. Il est temps de ne plus confondre « créolistique » et « Études créoles ». Car, comme le soulignait Glissant, « le monde entier va en créolisation » et cette créolisation demande à être analysée, décortiquée, pensée…

Qui d’autres que nous, Créoles « historiques », est mieux placé pour le faire ?

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