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VI° Konsitt de KoléTetKoléZépol

PRÉSENTATION DE KTKZ ET DU THÈME

Intervention de Jean Bernabé
PRÉSENTATION DE KTKZ ET DU THÈME

Bonvini ek lonnè respé ba zott toutt ki vini adan konsitt tala ki ka woulé pou rann péyi Matnik pli djok. Nou ké gadé wè, dabò pou yonn, sa KTKZ yé. Pou dé, asou ki sa pawol KTKZ ké woulé jòdi a.

1/ Tout d’abord, le rappel de ce qu’est KTKZ       

Je crois utile de rappeler d’emblée le concept fondamental de « trinité humaine » proposé par le philosophe et sociologue Edgar Morin et qui se résume à ces trois mots : Individu, société, espèce.

Ces trois réalités tout à la fois séparées et reliées renvoient à la complexité de la condition humaine. Il importe d’en tirer comme il se doit les conséquences dans toute démarche se voulant progressiste, ce qui est la vocation première de KTKZ, ce sigle représentant l’expression d’origine haïtienne Kolé tett kolé zépol, image très expressive de la Solidarité en actions et pas seulement en paroles.

Le mot « solidarité », en rapport avec le mot « solidité », traduit l’action volontaire de chaque individu avec d’autres, pour faire groupe, faire société, faire peuple, faire communauté, faire nation, pour le plus grand bénéfice de l’espèce humaine. De solitaire on devient donc solidaire.

 Ces premières remarques suggèrent que l’esprit KTKZ, pour être vraiment novateur, doit reposer en priorité sur une démarche individuelle et non pas individualiste ; sur une posture égocentrée, car tout être humain a besoin d’une armature bien sustentée, mais non pas égocentrique, c’est-à-dire ramenant tout à soi-même. Tout engagement ne peut donc être qu’individuel et l’individu ne peut prétendre changer le monde s’il ne cherche pas d’abord à se changer lui-même. Le mouvement dont votre présence crée aujourd’hui une configuration particulière, toujours modifiable et évolutive en fonction des circonstances et des engagements personnels, ne peut donc être qu’une tentative de rassemblement d’individus intellectuellement libres et de bonne volonté et en aucune façon un parti.

Parti, voilà un mot qui évoque l’idée de partition, de division, autant de phénomènes qui affectent communément la vie politique. Cela dit, la démarche KTKZ n’est pas ennemie des partis, lesquels sont nécessaires aux pratiques démocratiques, même si leurs orientations respectives sont différentes, voire opposées. KTKZ ne saurait être un parti, car il serait aberrant d’en envisager un qui soit composé de tout l’éventail si différencié des options en vigueur dans notre pays. Mais pour n’avoir pas des pratiques politiciennes, KTKZ ne saurait pourtant se situer en dehors des enjeux politiques. Pourquoi ? Tout simplement parce que l’Homme est un animal politique ! KTKZ ne saurait pour autant être apolitique, puisqu’il est et demeure par nature et par définition ouvert à tous les débats politiques quels qu’en soient les protagonistes. KTKZ est et restera une association de fait, inscrite dans une démarche volontairement maronne et coordonnée par un simple secrétariat, gestionnaire de rencontres citoyennes et élargi en fonction des disponibilités des uns et des autres, de diverses personnes de bonne volonté. A cet égard, je ne peux que remercier pour leur précieuse participation à l’organisation de ce konsitt Danielle Marceline, Daniel Bardury, Lise Hughes des Etages, Steve Gadet, Jean Trudo.

Mouvement à géométrie variable en fonction de la présence des participants à ses journées de rencontre, KTKZ se situe non pas dans la logique des alliances partisanes, mais dans l’éthique de la reliance citoyenne, en vue d’une vision plus collective, plus pertinente et plus efficace. A titre d’exemple, nul candidat à un mandat électoral ne saurait se réclamer d’un quelconque soutien de KTKZ. Illustrant cette ouverture à tous, l’instance secrétariale adresse pour chaque rencontre des invitations personnalisées à tous les élus du pays aux différents niveaux de représentation. En conséquence, aucun d’entre eux ne pourrait justifier son absence par une ignorance de ces manifestations et nul ne saurait en conscience propager la thèse que KTKZ soutient ou fait le jeu de tel ou tel parti. Il n’y a pas de membre encarté de KTKZ, mais des adeptes de l’esprit qu’il représente, au rebours des idéologies claniques.

Idéologie, voilà aussi un terme qu’il convient de bien cerner. Qu’est-ce en effet qu’une idéologie, sinon l’ensemble des idées que contient le cerveau de chaque individu, quelles que soient l’origine et la nature de ces idées ainsi que la manière dont elles sont assumées par chacun ? En d’autres termes, aucun être humain n’échappe à l’idéologie, car personne, sauf cas pathologique, n’est dépourvu de pensée. Le danger n’est donc pas d’avoir des idées, mais de s’y enfermer en considérant son idéologie comme la seule légitime, indépendamment de toute confrontation. Or la confrontation est et ne peut être qu’interindividuelle. Elle est dans la rencontre, événement qui ne peut se produire sans empathie, c'est-à-dire sans désir de comprendre le parcours idéologique des autres. Chaque humain en tant qu’idéologue, éprouve malheureusement un souci instinctif, celui de défendre sa sphère idéologique propre, voire de se défendre lui-même contre Autrui, ce qui constitue une vraie perversion de l’esprit. Nous nous identifions à ce que nous croyons être un patrimoine, un capital intellectuel non seulement à défendre contre les incursions d’autrui, mais aussi à promouvoir sur le terrain des autres, démarche intellectuelle délétère tour à tour défensive et impérialiste. Bref, nous portons chacun en nous notre part de barbarie intégriste. Comme quoi, la guerre entre les partis, voire dans certains cas en leur sein même, est aussi une guerre entre des individus, comportement impossible à KTKZ, dépourvu de tout enjeu de pouvoir. À la guerre et à l’affrontement, il devient donc impérieux et urgent de substituer la confrontation pacifique, loin de tout esprit « béni oui oui » ou encore « tout le monde il est bon, il est gentil ». Plus large sera l’éventail des idées mises en confrontation, plus globale sera la vision collective, fût-elle très différenciée, de l’ensemble des Martiniquais. Si nous ne mettons pas en œuvre cette vision collective au sein de notre pays, comment pourrait-elle jamais advenir avec nos voisins de la Caraïbe insulaire et continentale ?

Il n’y a pas une maison KTKZ, mais un esprit KTKZ. On n’y est pas encarté, mais on peut en être un adepte. KTKZ étant précisément un espace à géométrie variable de rencontre des individus et non pas des partis, il n’y a par conséquent aucune compromission ni trahison à ce que les membres d’organisations politiques idéologiquement très différentes voire opposées, puissent à titre individuel s’y rencontrer, démarche qui ne peut d’ailleurs qu’enrichir à terme leur propre famille politique, voire la société elle-même, grâce à l’interaction féconde des intelligences. Les dissensions proviennent d’une incompréhension, qui me semble avoir pour causes, soit un déficit d’explication, soit un défaut dans la réception du message, phénomènes que seule la rigueur intellectuelle de part et d’autre peut prévenir dans le cadre d’une pensée partagée. Mais la pensée partagée, c’est non pas la pensée unique, mais la pensée unifiée à un moment donné et demeurant en permanence soumise non seulement à évaluation mais aussi à évolution.

2) La thématique du jour : le partage du travail

La notion découlant immédiatement de la solidarité n’est autre que le partage : partage des expériences, partage des idées, partage des émotions, partage des efforts, partage des diagnostics et des pronostics, partage des échecs comme des réussites et, élément sociétal essentiel, partage du travail. Tel est précisément l’objet de la rencontre d’aujourd’hui, l’emploi étant pour ainsi dire le poumon de toutes les sociétés. Sans une pratique saine du travail, elles deviennent irrespirables, voire invivables !

Kouté pou tann, tann pou konprann, konprann pou rann ankò pli djok ! Toutes les propositions sont donc à écouter, l’écoute étant la condition de l’entente au double sens de ce mot : entendre l’Autre et aussi s’entendre avec l’Autre, opération difficile, complexe, mais salutaire. En conformité avec l’esprit KTKZ, des personnes défendant des points de vue divergents sont prêtes à échanger sereinement. Je pense, par exemple, à des compatriotes animant des expériences alternatives porteuses de solidarité (Goutte d'eau Lorrinoise, FIDES, SCIC, etc.).

C’est avec impatience que nous attendons les différents intervenants prêts à livrer leurs visions et propositions à un débat collectif encadré par des modérateurs. Certaines propositions émises pourront certes apparaître comme peu crédibles ou inapplicables. En revanche, si le rejet par les autorités administratives de leur expérimentation ou leur mise en œuvre ne devait avoir pour motivation que la transgression du code du travail en vigueur (le cadre des 35 heures, par exemple), une telle réaction ne pourrait alors que justifier une volonté de plus en plus déterminée et collective de secouer le joug d’une dépendance privant les Martiniquais de la prise en main pragmatique du devenir de leur société.

Chers camarades citoyens, tous les propos que je viens de formuler et tous ceux que nous aurons pu tenir aujourd’hui, n’auront été que du vent tant que ceux déclarés pertinents au terme des débats n’auront pas été traduits en actes concrets. Et c’est cela le plus difficile, le plus exigeant ! Il devient impératif de sortir de la « parolocratie », ou si vous préférez, de la « verbocratie », qui mine de plus en plus les sociétés prétendues démocratiques mais, en réalité, contaminées par les dérives du verbiage, de l’autopromotion par la « com » et de l’enfumage, pour enfin inaugurer l’ère d’une véritable « actiocratie », néologisme que me suggère la situation de notre pays, pour ne parler que de lui.

L’instance secrétariale de KTKZ, quant à elle, n’a par nature et par définition aucune vocation à se substituer aux individus, associations, partis, pouvoirs locaux, qui, eux seuls, peuvent et doivent engager et/ou accomplir le passage aux actes de façon responsable, en se situant précisément dans l’esprit kolé tett kolé zépol. Elle n’est qu’une instance d’organisation et de transmission du dialogue citoyen et des propositions qui peuvent en découler, pour un passage à l’acte. A bon entendeur, salut !

Ma mission de présentateur touchant à sa fin, je me réserve, si l’occasion m’en est donnée, de participer aux débats avec notamment une brève proposition de partage du travail, qu’à partir de mon seul bon sens citoyen j’avais formulée au mois d’avril de cette année, en commençant à réfléchir à la thématique du présent colloque. En ma qualité d’individu pas le moins du monde expert dans le domaine de l’économie, mais doté d’une simple légitimité de citoyen, j’avais alors à coeur d’établir une distinction essentielle entre deux  notions cruciales : celle d’assistance et celle d’assistanat. En effet, une des missions d’un Etat, qui se dit républicain et démocratique, consiste à assister les chômeurs en leur permettant d’être en contact avec le monde du travail légal (cela, c’est de l’assistance) et non pas, comme cela se fait à travers Pôle-Emploi, de les couper du travail en favorisant, indemnités à l’appui, leur enlisement dans l’oisiveté ou le travail informel (cela, c’est de l’assistanat). Cela dit, et c’est bien plus conforme au déroulement de notre rencontre, parmi les intervenants de ce matin, vous pourrez entendre une proposition concrète sur le partage du travail, celle de Maurice Laouchez, qui parlera non pas en sa qualité de membre du secrétariat de KTKZ, mais en raison de ses compétences dans les domaines financier et économique. Le rôle du secrétariat de KTKZ sera ensuite non seulement de diffuser cette proposition, qu’elle soit amendée ou pas au cours de nos débats, auprès de nos concitoyens sur le maximum de supports médiatiques, mais aussi de la transmettre de façon officielle aux instances qui sont à même de la transformer en un véritable projet, en l’inscrivant, ne serait-ce qu’à titre expérimental pour commencer, dans la réalité économique de notre pays. Nous ne pouvons que souhaiter à l’avenir la multiplication d’idées novatrices et concrètes au service du développement et de l’épanouissement du Pays Martinique.

Mèsi davrè zott kouté mwen ! Pliss foss ba nou toutt ki isi a ! Pliss lespwa ba péyi a !

 

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