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POURQUOI CELA NE SERAIT-IL PAS POSSIBLE A LA MARTINIQUE ?

POURQUOI CELA NE SERAIT-IL PAS POSSIBLE A LA MARTINIQUE ?

 La Nouvelle-Calédonie ou Kanaky connaîtra bientôt son deuxième référendum sur l'accession ou non du pays à la pleine et entière souveraineté c'est-à-dire à l'indépendance.

 Le premier référendum avait vu la victoire du "NON" par 56% des votants. Si le deuxième obtient à nouveau un résultat négatif, un troisième pourra être organisé en 2022. En cas de troisième vote négatif, c'en sera fini de la volonté d'une bonne moitié des Calédoniens, les Kanaks qui sont la population autochtone, de se libérer enfin du joug colonial.
 Il faut préciser que les dés sont quelque peu biaisés car depuis une cinquantaine d'années, le pouvoir français n'a cessé de favoriser l'immigration non seulement de "Métropolitains", mais aussi de Tahitiens, de Wallisiens, de Vietnamiens, de Réunionnais et même d'Antillais, ce qui a eu pour effet de mettre les Kanaks en minorité. Cependant, il ne s'agit pas d'un affrontement entre Autochtones et non-Autochtones ou entre Noirs et Blancs car de nombreux Kanaks sont favorables au maintien au sein de la France tandis qu'une fraction, certes minoritaire, des "Caldoches" (Békés calédoniens) est favorable au contraire à l'indépendance. Le principal parti indépendantiste, le FLNKS (Front de Libération National Kanak et Socialiste) a d'ailleurs comme mot d'ordre : "UNITE-PAYS".
 Chacun a en mémoire les luttes menées par ce parti, l'assassinat de Jean-Marie TJIBAOU, celui d'Eloi MACHORO et de bien d'autres militants, luttes qui ont été férocement réprimées par le pouvoir français et sa soldatesque. Mais l'Etat français n'a pourtant pas réussi à étouffer la voix des Kanaks et a été contrainte d'organiser un référendum sur l'indépendance et en octobre prochain un deuxième. Il faut toutefois rappeler que la France est rarement partie pacifiquement d'un territoire qu'elle colonisait : les guerres et révoltes d'Indochine, d'Algérie, de Madagascar, du Cameroun etc. le prouvent amplement.  
 Que se passera-t-il donc si le 4 octobre prochain, les électeurs calédoniens se prononcent majoritairement pour le "OUI" ?  
 La France devra dans ce cas préparer l'accession du territoire à l'indépendance, chose qui aurait été simple s'il n'était peuplé que par les Kanaks. Chose compliquée du fait de la présence importante démographiquement parlant des Caldoches, Tahitiens, Wallisiens et autres. Sans doute qu'une fraction de toutes ces personnes demandera soit à rentrer en France soit dans leur île d'origine, mais ce ne sera jamais qu'une fraction. La Kanaky indépendante sera à son tour bien obligée de composer avec elles. On ne peut refaire l'histoire. Il s'agira alors, comme le souhaitait Jean-Marie TJIBAOU, de construire une Nation, une nouvelle Nation mais à dominante kanake cette fois. Dirigée majoritairement par des Kanaks. Ou au contraire, le pire peut aussi se produire : une guerre civile comme à la fin de la guerre d'Algérie en 1962. Ce sera à la France de veiller à ce que des événements aussi regrettables que l'incendie de la bibliothèque de l'Université d'Alger ne se reproduisent pas à Nouméa. Il y va de se son honneur et de sa crédibilité internationale.
  Quelles leçons, nous, Martiniquais, pourrions tirer de la situation calédonienne ?
  D'abord, notre situation est très différente de celle des Kanaks. Ces derniers sont, en effet, un peuple autochtone, qui existait mille ans avant la colonisation française, alors que les Martiniquais sont un peuple artificiellement créé par la colonisation de l'Amérique il y a quatre petits siècles. Le Kanak est Kanak et se veut Kanak. Il ne se réclame d'aucune autre terre alors que nous, Martiniquais, nous avons de fortes allégeances extérieures, fussent-elles mythiques : la France (pour les Békés et les Noirs assimilés), l'Afrique (pour une partie des Noirs), l'Inde (pour certains Indiens), la Chine (pour certains Chinois) et le Levant (pour certains syro-libanais). Une trop modeste fraction des Martiniquais fait allégeance à la Martinique et à elle seule : c'est là notre principal problème.
 Ensuite, hystériquement accrochés à ces allégeances extérieures, nous n'avons de cesse de nous affronter entre nous à coup de pathétiques "Vive la France !" ou "L'Afrique est notre vraie patrie !", incapables de prendre exemple sur nos voisins caribéens qui, eux, se concentrent d'abord et avant tout sur leur caribéanité. Incapables de comprendre que si se réclamer de ses ancêtres est parfaitement légitime, vouloir revenir aux pays des différents ancêtres (ou vouloir s'y raccrocher à tout prix) ne peut être qu'un choix individuel, absolument pas collectif. Quand l'Empereur Hailé Sélassié a mis gratuitement des terres à la disposition des rastas jamaïcains ou de tout Jamaïcain souhaitant s'installer en Ethiopie, seuls 1.500 d'entre eux (sur...3 millions d'habitants) ont franchi le pas. Ils vivent aujourd'hui dans la ville de Shashamene, parlant créole jamaïcain et ne s'étant jamais intégrés à la population locale.
 Individuellement personne n'empêche à un Béké de s'installer définitivement en France. Ni à un Noir en Afrique. Ni à un Indien en Inde. Ni à un Syro-libanais au Levant etc., mais en aucun cas cela ne saurait être un choix collectif. Notre pays est la Martinique et nous n'en avons pas d'autre. On le voit : nous sommes à  mille lieues des préoccupations des Kanaks. Ou plus exactement, les Kanaks n'ont pas ce genre de problèmes. Ils savent qui ils sont et ne souffrent pas de troubles identitaires. Ils réclament simplement la jouissance d'une terre qui est la leur depuis plus de mille ans.  
 Cependant, en dépit de ces énormes différences entre la Kanaky et la Martinique, les Martiniquais ne pourront pas être indifférents ou insensibles au résultat du deuxième référendum qui s'y déroulera bientôt. Le vote "OUI" ou "NON" interpellera forcément chacun (e) d'entre nous et peut-être alors qu'une question s'infiltrera dans notre esprit. Une question taboue pour certains, scandaleuse pour d'autres, prématurée pour beaucoup.
 Celle-ci :
 "Pourquoi un référendum ne serait-il pas possible à la Martinique?"...
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