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NOUS NE SOMMES PAS UNE « MINORITE VISIBLE » DE LA FRANCE. NOUS SOMMES UNE « NATION » !

(3è partie et fin)
NOUS NE SOMMES PAS UNE « MINORITE VISIBLE » DE LA FRANCE. NOUS SOMMES UNE « NATION » !

Demander qu’une claire distinction soit dorénavant établie entre Antillais et Guyanais d’une part et Français noirs (Antillopolitains et Guyanopolitains) d’autre part ne revient aucunement à nier l’apparentement entre ces deux groupes humains, ni non plus à vouloir empêcher la nécessaire solidarité entre eux.

Comment pourrait-on s’opposer pareille chose à l’heure où la France compte 7 millions de lepénistes (6,5 millions qui ont voté Marine Le Pen + 500.000 lepénistes qui ont voté Sarkozy pensant voter utile) ?

Pour ma part, je suis proche du Parti des Indigènes de la République, dirigé par la courageuse Houria Bouteldja, et je dispose même d’un blog sur le site-web de ce mouvement. Mais je me garde bien de dire à ces nouveaux Français (Arabes, Antillais, Africains etc.) ce qu’il devrait faire !

Je n’émets d’opinion au sujet de leurs problèmes que lorsque je suis sollicité et uniquement dans ce cas, car vivant dans un autre pays, situé à 7.000kms, je ne vis pas au quotidien ce qu’ils subissent. Vivre à Fort-de-France n’est pas vivre à Aubervilliers. Je partage donc l’analyse du Parti des Indigènes selon laquelle les banlieues sont des sortes de colonies intérieures de la France. Dans le passé, cette dernière établissait des colonies hors de son territoire (en Afrique, en Asie, aux Antilles etc.) ; de nos jours, elle en possède en son propre sein. Chaque fois qu’un soutien m’est demandé, je n’hésite jamais à le leur apporter, mais toujours dans le respect de nos différences.

Les Antillopolitains et les Guyanopolitains, comme les Beurs (ou Arabo-français) sont nés en France, ils ont été élevés, éduqués en France, ce sont des Français à part entière. Des Noirs français ou des Français noirs, comme l’on voudra. Ils viennent d’ailleurs de se réunir en congrès à Paris pour protester contre le peu de candidats « noirs » aux législatives prochaines dans l’Hexagone.

Comme je viens de l’écrire, on peut raconter ce qu’on veut, naître et vivre à Garges-les-Gonesses et naître et vivre à Basse-Pointe, à Vieux-Habitants ou à Sinnamary n’est pas et ne sera jamais la même chose. On ne peut abolir ni la géographie ni l’histoire !

Les Antillais et Guyanais qui ont émigré en France dans les années 50-60 du siècle dernier ont fait des enfants sur place lesquels ont fait des enfants à leur tour. On en est désormais à la troisième, voire même à la quatrième génération pour certains. Ces Français noirs constituent une « minorité visible » de leur pays, la France, et ils ont parfaitement raison de lutter pour acquérir les mêmes droits que leurs compatriotes blancs. Mais il y a un droit qu’ils n’ont pas : nous dire à nous, Antillais et Guyanais, quel type de relation nous voulons établir avec la France. Ils n’ont pas le droit de s’opposer à notre désir d’accéder un jour, proche ou lointain, à notre pleine et entière souveraineté nationale. Et nous, nous n’avons pas le droit de leur dire comment ils doivent se comporter à Garges-les-Gonesses, à Evry ou à Meaux.

Ce problème est réglé depuis longtemps s’agissant des Beurs et des Afropolitains. Rachita Dati ou Zidane ne se permettent pas d’émettre des jugements sur le Maroc et l’Algérie. Ni Rama Yade sur le Sénégal. D’ailleurs, lors de la visite à l’Elysée de Kadhafi, cette dernière avait protesté en s’offusquant que celui qu’elle considérait comme un dictateur, veuille « essuyer ses pieds sur le paillasson de notre pays ».

En disant « notre pays », Yade ne faisait qu’énoncer une évidence. Que Kadhafi aille en visite au Sénégal, ce que le Guide fit à diverses reprises, n’était pas son problème. Qu’il vienne dans son pays à elle, la France, l’avait choquée. Si je ne suis pas du tout d’accord sur le jugement qu’elle porta sur Kadhafi, j’estime qu’en tant qu’Afropolitaine, en tant que Française noire, elle avait parfaitement le droit d’émettre des réserves quant à la visite à l’Elysée de celui-ci. Elle n’avait fait là qu’exercer son droit de citoyenne française.

On objectera sans doute que la difficulté à clarifier les choses vient du fait que le Maroc, l’Algérie et le Sénégal sont des pays indépendants alors que la Martinique est encore une possession française. C’est vrai. Autant il est facile, en effet, de distinguer entre un Beur et un Algérien ou Marocain, entre une Afropolitaine comme Yade et une Sénégalaise, autant il est malaisé de distinguer entre un Antillopolitain/Guyanopolitain et un Antillais/Guyanais. Oui, cela constitue une difficulté. Une énorme difficulté. Mais elle n’est pas du tout insurmontable. Il suffit que certaines têtes d’affiche, certains leaders d’opinions, certaines vedettes du sport ou du showbiz antillopolitaines et guyanopolitaines arrêtent d’entretenir la confusion. Il faut qu’ils cessent d’imaginer que lorsqu’ils parlent, ils le font pour nous aussi qui vivons à 7.000kms et sur un autre continent. Le combat antiraciste que mène un Lilian Thuram, par exemple, est parfaitement respectable, admirable même, mais c’est le combat de la « minorité visible » que constitue les Français noirs, pas celui des Antillais et des Guyanais.

Je ne suis la minorité de personne ! Je suis majoritaire dans mon pays, la Martinique. Je ne suis pas un « Black », je suis un Martiniquais. Un Caribéen, un Créole. Oui, il y a aussi un combat antiraciste à mener à la Martinique, mais il est complètement différent de celui de Thuram et des Français noirs. C’est le combat pour faire respecter les droits des Haïtiens, des Dominiquais, des Saint-Luciens, des Dominicains, des Syro-libanais, des Chinois, des Juifs etc…qui ont émigré chez nous. Oui, les Juifs ont le droit d’avoir une synagogue à Schoelcher et jamais ne me viendrait à l’idée d’aller apposer des graffitis ou de souhaiter qu’une bombe soit jetée contre leur lieu de culte. Et cela, tout pro-palestinien que je suis, même aux heures les plus sombres comme en décembre 2008, quand Israël vitrifia la bande de Gaza, tuant, en un mois, 1.500 Palestiniens et blessant 3.000 autres, y compris des femmes et des enfants. Oui, il faut respecter aussi les droits des « Métros » qui vivent à la Martinique. Cesser ces vexations, ces remarques imbéciles, ce racisme primaire dont beaucoup sont les victimes au quotidien.

Je fais remarquer au passage que le même crétin qui proteste contre le trop grand nombre de Métros à Tartane ou au Diamant, vote contre le minuscule début de commencement d’autonomie qu’aurait été l’Article 74 !!! Je ne veux pas du « Blanc » chez moi, mais en même temps, je reste accroché comme une sangsue au pays de ce même Blanc !!! Et en cas de référendum sur l’indépendance, je voterai évidemment « NON ».

Comportement illogique, infantile, absurde que Césaire avait qualifié de « mendicité arrogante ».

Etablir un clair distinguo entre les demandes, les désirs ou les besoins des Français noirs d’un côté et d’un autre côté, les Antillais/Guyanais n’est pas impossible. Il suffit d’un minimum d’honnêteté intellectuelle de part et d’autre.

Chose dont a toujours fait preuve un Harlem Désir, par exemple, numéro 2 du Parti socialiste français, pour lequel j’ai beaucoup d’estime. Né en France de père martiniquais, élevé et éduqué en France, il n’a jamais cherché à se mêler des problèmes de la Martinique. A l’époque où il créa SOS-Racisme, il n’a jamais cherché à établir une section ou une antenne de son mouvement à la Martinique. Devenu grand ponte du PS, il n’est jamais venu en tournée électorale chez nous pour nous demander de voter pour son parti. J’appelle cela du respect. Tout simplement du respect. Et il y a beaucoup plus de Harlem Désir en France qu’on ne le croit (le chanteur Julien Clerc, par exemple, dont le père était guadeloupéen), simplement ils sont peu connus et de toutes façon les médias ne mettent en avant que les confusionnistes, ceux qui s’emploient confondre Antillopolitains et Antillais.

Or, il faudra bien qu’un jour quelqu’un demande à ces footballeurs, chanteurs ou mannequins antillopolitains de cesser de vouloir parler à notre place. De cesser de s’imaginer qu’ils parlent en notre nom. Monsieur Claudy Siar et Mme Pau-Langevin ne parlent pas pour moi !

Merci en tout cas, Harlem Désir ! C’est toi qui aurait dû être ministre car la France est ton pays.

Mais de notre côté, nous autres Antillais et Guyanais, il faut aussi que nous respections les Français noirs et que nous nous mêlions de ce qui nous regarde. Une pétition, publiée récemment dans « LIBERATION », demandait que l’on évite d’enseigner une « histoire de France divisée en communautés », mais bien une histoire commune à tous les Français de quelque origine qu’ils soient. Elle a été signée par des intellectuels français blancs et français noirs. Tout à fait normal ! Là où par contre, il y a problème, c’est quand on découvre dans la liste des signataires les noms d’intellectuels antillais ou guyanais. Je n’ai pas à dire aux Français (blancs ou noirs) quel type d’histoire ils devraient enseigner dans leurs écoles ou leurs universités.

Ce n’est pas mon problème !

Mon problème c’est de travailler à bâtir une histoire martiniquaise, caribéenne, créole, américaine. Mon problème c’est de me battre pour imposer l’usage de manuels d’histoire de mon pays et de mon continent dans les écoles martiniquaises. Ce que moi et d’autres avons fait, n’étant pas historiens, mais linguistes, pour la langue créole, par exemple. Autre exemple : si je vote à l’élection présidentielle française, ce sera uniquement pour le ou les candidats qui se seront clairement positionnés en faveur de l’indépendance de la Martinique. Dans la dernière élection, il n’y en avait qu’un seul, le trotskyste Poutou. Et je partage entièrement l’analyse du GRS sur Mélenchon, ce néo-jacobin qui tient, par exemple, des propos ahurissants sur « la grandeur de la langue française » (sic) dans la lettre aux Français de l’étranger qu’il a diffusé pendant la campagne électorale. Le « mélenchonisme » de certains Martiniquais n’est donc que l’une des nombreuses facettes du néo-assimilationnisme que j’ai évoqué dans mes chroniques précédentes.

La Martinique n’est pas une « minorité visible » de la France. Nous sommes une NATION.

Une Nation en danger de disparition…

(fin)

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