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« L’Etoile noire » de Michèle MAILLET

Marie-Noëlle RECOQUE DESFONTAINES
« L’Etoile noire »   de Michèle MAILLET

Michèle Maillet a le mérite d’avoir exhumé du tréfonds de l’histoire, une tragédie passée sous silence.. En 1990, elle signe un roman historique inspiré de faits vrais : des noirs ont été déportés dans des camps de concentration, des noirs y ont souffert, des noirs y sont morts victimes de la barbarie nazie. Michèle Maillet a travaillé avec un historien juif brésilien Micha Grin qui, dit-elle, l’a aidée et conseillée. Son roman s’est appuyé sur les témoignages de Rodolphe Roussi, un Martiniquais ancien prisonnier de guerre, et sur ceux de John William, un chanteur noir qui a connu la déportation.                           

 

Bordeaux : Une irruption de la soldatesque allemande dans une cuisine, Sidonie, servante d’une châtelaine juive, est prise dans une rafle. Elle tente une justification : «Je suis catholique». Mais pour les nazis, son crime à elle, c’est d’être noire. Sidonie, Martiniquaise, est mère de jumeaux : Nicaise et Désiré. Charroi en camion puis en train dans la froidure, la neige et le brouillard. Dans son for intérieur, elle s’insurge ; elle et ses enfants sont français, bien français mais les rumeurs lui apprennent que les Allemands haïssent les noirs, qu’ils ne font aucune différence entre « les Africains des troupes coloniales et les Martiniquais français depuis des siècles ».

 

Sidonie se souvient que ses parents lui serinaient que l’esclavage n’était qu’un souvenir lointain, qu’il fallait oublier mais son père parlait beaucoup de Schœlcher. Soucieux de tourner le dos, à sa manière, à des siècles de servitude, il avait sommé sa fille de ne pas avoir commerce avec un nègre, il voulait des petits enfants à la «peau sauvée», « plus beaux », « plus intelligents ».

 

On roule, on roule. Arrivée dans une gare de transit, elle grimpe dans un train de marchandises. Dans le flanc du wagon à bestiaux plein à craquer, les interrogations affluent, les évidences basculent et les souvenirs surgissent: l’enfance chez les békés qui l’ont élevée, la rencontre avec Jean le père de ses jumeaux, qui s’est  volatilisé, ses parents ne voulant pas d’une négresse dans la famille, Saint-Pierre de la Martinique, la Roxelane et ses lavandières…

 

Un mort dans le wagon. Panique. Déchaînement de violence. Fureur. Rixe. Folie. Instinct de conservation exacerbé… Pour la première fois, Sidonie sent remonter en elle, « la mémoire de l’Afrique », et celle du bateau négrier.

 

Voyage vers l’enfer, promiscuité, fatigue, inconfort, angoisse. Lutte pour la vie au rythme des roues sur les rails : saccades sempiternelles.

 

Arrivée dans un camp. Troupeau d’humains à bout de forces. Baraquements vétustes, clôtures, barbelés, miradors. Contrôle. Elle est séparée de Désiré, son fils. La Sainte Vierge et le Dieu de l’Afrique sont impuissants à conjurer le malheur : « Les corps s’éparpillent sur la terre battue boueuse. Parmi ces êtres qui agonisent, un petit corps de couleur, les yeux ouverts, révulsés. » Elle reconnait, sa fille Nicaise.

 

Nouveau charroi vers un autre camp : Ravensbrück. Jour après jour, Sidonie écrit dans un carnet ce qu’elle vit, ce qu’elle voit, avec en tête un seul but : mourir debout. Un mysticisme la reliant aux croyances de l’Afrique l’aide à résister. Elle raconte la survie dans ce camp de concentration. Récit qui s’avérera plus tard un extraordinaire témoignage sur la vie menée par les déportés dans ce lieu clos et sur l’horreur nazie. « Ce carnet a été envoyé par les soins d’une codétenue à la mère de Sidonie, qui l’a reçu après la guerre ». C’est sur cette note tragique que s’achève l’ouvrage.

 

      Marie-Noëlle RECOQUE DESFONTAINES

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