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HOURIA BOUTELDJA DANS LE SILLAGE D'AIME CESAIRE ET DE FRANTZ FANON (1è partie)

Raphaël CONFIANT
HOURIA  BOUTELDJA DANS LE SILLAGE D'AIME CESAIRE ET DE FRANTZ FANON (1è partie)

   Lorsque l'ouvrage de Houria BOUTELDJA est sorti, il y a un peu plus d'un an, j'avais tout de suite été tenté d'en faire un compte-rendu tellement il m'avait enthousiasmé, mais je me suis vite ravisé, ne voulant pas participer à la cacophonie, souvent malsaine, qui s'était presque immédiatement installée dans la plupart des grands médias français et cela sous la plume des bienpensants de gauche comme de droite. Je m'étais alors contenté d'un bref article brossant le portrait de l'auteur :

http://www.montraykreyol.org/article/houria-bouteldja-ou-la-colere-lumineuse

   En créole, nous avons un proverbe qui peut se traduire de la sorte : "On ne lance des pierres qu'à un manguier chargé de fruits". Autrement dit si l'ouvrage de H. BOUTELDJA était insignifiant que le disent ses détracteurs, s'il n'avait ni style ni contenu ni puissance d'argumentation ni force de conviction, jamais il n'aurait été aussi virulemment attaqué. Visiblement, son livre a touché sa cible ! Il a dérangé, bousculé, énervé, encoléré et cela exactement comme, en leur temps, LE DISCOURS SUR LE COLONIALISME (1950) d'Aimé CESAIRE et LES DAMNES DE LA TERRE (1961) de Frantz FANON l'avaient fait.

   Qu'on en juge :

 

   __LIBERATION (Clément GHYS) : "Sur la question légitime du legs colonial, la figure de proue du Mouvement des indigènes de la République signe un brûlot déterministe : Blancs, juifs et arabo-musulmans sont présentés de façon si caricaturale que la thèse du livre s’en trouve invalidée, éclipsant de justes indignations."

 

   __LE MONDE DIPLOMATIQUE (Serge HALIMI) : "Pour s’assurer que toutes les balises historiques du combat multiséculaire pour l’émancipation humaine (le rationalisme, le syndicalisme, le socialisme, le féminisme, l’internationalisme…) seront balayées par les torrents essentialistes et religieux qu’elle appelle de ses vœux, Bouteldja conclut son propos par une oraison furieusement anti-Lumières. Le « potentiel égalitaire » du « cri Allahou akbar !  » tient à ce qu’il « remet les hommes, tous les hommes, à leur place, sans hiérarchie aucune. Une seule entité est autorisée à dominer : Dieu ».

 

   __MARIANNE (Jack DION) : "Détourner un avion est spectaculaire et dangereux. Détourner des valeurs est moins spectaculaire, mais tout aussi dangereux. Tel est l'exercice auquel se livre Houria Bouteldja, égérie des Indigènes de la République, dans son dernier ouvrage, les Blancs, les Juifs et nous, petit bréviaire de l'antiracisme détourné en racialisme décomplexé."

 

   __FRANCE 2 (Thomas GUENOLE) : "Vous êtes raciste madame", accuse le politologue Thomas Guénolé, lors de l'émission de "Ce soir ou jamais", sur France 2, vendredi dernier. Sa cible? Houria Bouteldja, militante politique franco-algérienne, aujourd'hui porte-parole du parti des Indigènes de la République. Un mouvement né en 2005 se revendiquant "antisioniste" et "anticolonialiste".  

 

   __SITE AGORAVOX (Johan Livernette) : "Vous êtes le parfait exemple du racisme inversé, de l’échec de l’intégration en France, du communautarisme exacerbé. Votre discours anti-français pue l’arrogance. Vous m’inspirez juste le dégoût. Le même dégoût que vous inspirez à beaucoup de gens, même à des Maghrébins contrairement à ce que vous pouvez croire. Et c’est bien ça le pire."

 

   Inutile de continuer à faire la liste des contre-vérités, inepties et autres flagellations euro-suprématistes qui ont été déversées sur l'ouvrage de Houria BOUTELDJA ! LE DISCOURS SUR LE COLONIALISME d'Aimé CESAIRE et LES DAMNES DE LA TERRE de Frantz FANON avaient subi la même lapidation. Ces auteurs avaient été qualifiés d'extrémistes, de racistes et autres noms d'oiseaux par l'intelligentsia au service d'une bourgeoisie indécrottablement colonialiste, mais avaient tout de même été défendus par de brillants esprits tels que Jean-Paul SARTRE, Jean GENET ou encore François MASPERO. Le premier, SARTRE, préfaçant même LES DAMNES DE LA TERRE, ouvrage qui fut saisi par la police une heure à peine après avoir été mis en vente dans les librairies de France et de Navarre !!!

  En dehors des milieux "indigènes", l'ouvrage de Houria BOUTELDJA n'a, hélas, trouvé qu'un défenseur ayant quelque envergure, la comédienne OCEANEROSEMARIE, ce qui en dit long sur l'état de l'intelligentsia actuelle :

 

   " Il est très facile de discréditer un texte, surtout quand la pensée est complexe et formulée sous forme de paradoxes. Et, depuis la sortie du livre de Houria Bouteldja, c’est «#PassionRatonnade» : de Guénolé sur le plateau de Ce soir (ou jamais !), à Marianne ; et les flemmards se satisfont de ce massacre sans prendre la peine de la lire, répétant à tout va qu’elle est antisémite, sexiste, homophobe et raciste anti-Blancs…"

 

   Je considère pour ma part, même si je ne partage pas l'entièreté des thèses défendues par son auteur, LES BLANCS, LES JUIFS ET NOUS. VERS UNE POLITIQUE DE L'AMOUR REVOLUTIONNAIRE comme le troisième texte francophone le plus puissant s'agissant de la mise à plat et la mise à l'index des pratiques colonialistes européennes (et étasuniennes) et du sort de ceux qui les ont subies et continuent de les subir. Car le colonialisme n'est pas mort contrairement à ce que nous pourrions croire suite à l'accession à l'indépendance des pays arabes, négro-africains et asiatiques. Il a non seulement continué sous la forme du néo-colonialisme dans ces différents pays, mais il aussi été en quelque sorte rapatrié dans l'ex-métropole ! Ainsi, les portions de territoire que la presse nomme "banlieues", "zones sensibles", "quartiers" ou "territoires perdus de la République", dont le fameux 9-3 est en quelque sorte l'emblème, sont désormais des colonies...intérieures de la France. Il en va de même dans les autres pays ex-colonisateurs. Et dans ces colonies d'un nouveau type vivent donc des néo-indigènes à savoir...les Indigènes de la République, nom d'ailleurs du parti politique créé par Houria BOUTELDJA et ses amis. Ce sont, pour la grande majorité d'entre eux, les descendants de ces centaines de milliers de Maghrébins, d'Africains et d'Antillais qui, au sortir de la deuxième guerre mondiale, ont contribué au redressement économique de la France et par conséquent à ce que l'on a appelé plus tard les Trente glorieuses.

   Faire pareille analyse provoque en général une poussée de boutons chez la plupart des grands esprits français (tels les gens de la LICRA pour qui toute critique d'Israël relève de l'antisémitisme) et une levée de boucliers chez les plus fachos (n'ayons pas peur des mots !) d'entre eux. Il n'est donc guère étonnant que l'ouvrage de H. BOUTELDJA se soit vu invalider, d'un revers de phrase méprisant, par les Alain FINKIELKRAUT, André GLUCKSMAN et autres partisans de la suprématie "blanche". Car on peut ne pas être d'accord avec telle ou telle thèse, on peut la discuter, on peut s'employer de la réfuter, mais a-t-on le droit de la disqualifier au départ ? Or, c'est l'attitude qu'ont adopté nombre de ces "penseurs" à l'endroit du livre, le lisant en diagonale pour certains ou déformant son contenu pour d'autres, chose qui, fort heureusement, ne l'a pas empêché de devenir une sorte de best-seller dans sa catégorie.

   C'est que ce qu'il y a d'emblée de commun chez CESAIRE, FANON et BOUTELDJA, c'est le souffle. C'est la puissance du Verbe. Le sens de la métaphore et de la formule qui fait mouche. C'est l'implacabilité de la démonstration et le refus de transiger face à l'ignominie pour plaire et complaire à ceux qui dirigent la fameuse République des Lettres ainsi que ceux qui dirigent la République tout court. Ne flatter ni l'intelligentsia ni la classe politique, mais leur dire leur fait et cela haut et fort. Et cela dans leur langue ! Car une fois qu'on a ouvert LES JUIFS, LES BLANCS ET NOUS. POUR UNE POLITIQUE DE L'AMOUR REVOLUTIONNAIRE, impossible de le refermer tant le texte nous prend à la gorge, tant l'analyse est servie par des formules-choc tellement éclairantes qu'elles valent plus que des milliers de pages de savantes analyses psycho-anthropo-sociologico-machins telles que les produisent à la chaîne l'université française. Pages qui ne sont lues que par les universitaires eux-mêmes et qui n'ont aucunement le pouvoir de contribuer à changer le réel. Car en dérangeant le lecteur, le texte césairien, fanonien et bouteldjien l'oblige à se remettre en question comme on le verra dans notre prochain article, sauf à être malhonnête avec lui-même...      (à suivre)

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