Il existe un désastre masculin à la Martinique depuis quelques années. Au baccalauréat, les filles sont trois fois plus nombreuses à réussir que les garçons. A l'université, toutes filières confondues, ces derniers sont minoritaires et les nouveaux médecins, dentistes, pharmaciens ou avocats sont désormais à plus de 70% de sexe féminin.
On aurait pu se réjouir de cette sorte de rééquilibrage s'il ne se révélait pas en réalité un nouveau déséquilibre beaucoup plus dangereux à moyen terme que l'ancien. Car demain, lorsque tous ces garçons, devenus adultes, qui auront quitté l'école ou l'université sans le moindre diplôme, se retrouveront face à des générations de jeunes femmes diplômées, que se passera-t-il ?
Si aujourd'hui, la violence contre les femmes est déjà insupportable, que sera-t-elle dans dix ou vingt ans ? Il y a tout lieu de craindre le pire. Alors, il convient de se poser la seule question qui vaille : est-il encore possible de rattraper les choses c'est-à-dire de remettre cette jeunesse masculine en déshérence sur les rails ? Difficile ! Très difficile. Pourquoi ? Parce que cette génération s'est, hélas, laissée prendre dans les filets d'une triple alliance : fric-sexe-drogue. Alliance nourrie par les clips de ragga dance-hall jamaïcain et de rap noir américain qui vantent à longueur de journée le dollar, les femmes nues qui remuent leur "bonda" et le "zeb".
D'abord, le dieu fric ou plus exactement le dieu dollar devant lequel se prosternent ces musiciens et chanteurs qui n'ont pourtant que les mots "black" ou "Africa" à la bouche. Il faut les voir, lourdement lestés de grosses bagues et d'énormes chaînes en or, manipuler des liasses de billets verts dans leurs clips, cela au volant de grosses voitures. Le jeune qui les regarde n'a qu'une envie : les imiter, devenir comme eux. Comme dans le même temps, ces ragga-dancehalleurs exhibent aussi leurs "poteaux" de ganja, on comprend vite le lien qui unit les deux premiers éléments du cocktail. Vendons de l'herbe, du crack ou de la cocaïne et comme ça, on aura du fric à n'en plus savoir que faire. Lequel fric nous ramènera des tonnes de "djal" aux fesses rebondies déjà prêtes à se faire enfiler.
Comment donc lutter contre ces images désastreuses qui pourrissent notre jeunesse masculine ? D’autant que le premier résultat de ce cocktail diabolique n’est autre que la violence à l’état pur. Violence qui ne touche pas que la conurbation Schoelcher-Fort-de-France-Lamentin, mais l’ensemble du pays. Dans une commune rurale comme le Gros-Morne deux jeunes de moins de 25 ans ont été abattus le mois dernier. C’est quasiment tous les jours désormais qu’une, deux, voire trois agressions, à l’arme blanche ou à feu, se produisent contre des citoyens désemparés. On pourra toujours invoquer le fort de taux de chômage qui sévit en Martinique sauf que nombre de ces jeunes ne sont pas encore en âge de travailler. Ils sont collégiens, lycéens, parfois étudiants. On pourra invoquer la démission familiale, l’interdiction de corriger les enfants mal élevés ou turbulents, la déshérence culturelle, le colonialisme et patati et patata. On pourra invoquer tout ce que l’on veut. Il n’en demeure pas moins que la première cause de ce désastre masculin n’est autre que le flot d’images et de clips que nous déversent sans limites toutes ces chaînes de télé ou Internet sur lesquels nos jeunes garçons et nos jeunes hommes sont branchés quasiment jour et nuit.
Alors que faire ?...
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