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Fin prévisible pour une initiative entrepreneuriale martiniquaise : AVA AIR liquidée

Fin prévisible pour une initiative entrepreneuriale martiniquaise : AVA AIR liquidée

   Dans une "économie de comptoir" telle que celle qui sévit à la Martinique, investir dans un secteur non directement lié au système en place n'a guère de sens, voire même est absurde. Pourtant, régulièrement de jeunes Martiniquais intelligents se lancent dans l'aventure, se jettent plutôt à l'eau, plein d'enthousiasme et d'espoir. Hélas ! Plus souvent que rarement, l'affaire se termine en catastrophe. Catastrophe annoncée pourrait-on dire. C'est ce qui vient d'arriver à un jeune couple d'entrepreneurs qui s'est lancé dans le secteur du transport aérien, embauchant dix personnes et ayant eu le temps de faire voyager pas moins de 12.000 passagers vers la Guadeloupe et Saint-Martin. La compagnie AVA AIR et son seul avion de 20 places__un Jetstream 32__plus économique et plus écologique que les appareils des autres compagnies déjà installées sur ce marché, témoigne de l'esprit d'entreprise, de l'inventivité et du courage d'un grand nombre de Martiniquais, contrairement à ce que racontent les prédateurs békés confortablement installés dans l'économie de comptoir.

   En effet, il est cent fois moins risqué et mille fois plus rentable d'opérer dans le secteur non-productif des supermarchés, des magasins de bricolage, de sport, de nautisme ou encore les concessions automobiles, secteur quasi-totalement accaparé par la caste, que dans des secteurs productifs. Dans le premier secteur, les soi-disant entrepreneurs sont juste des prédateurs de 40%, ce sursalaire versé aux fonctionnaires antillais qui fait tourner la prétendue économie martiniquaise depuis bientôt un demi-siècle. Sans cette manne les supermarchés des Békés ne seraient pas toujours bondés et le Martiniquais moyen ne pourrait pas changer de voiture tous les 3 ou quatre ans (contre 6 ou 7 ans en France !). S'il y a des familles martiniquaises qui figurent parmi les grandes fortunes françaises, c'est surtout et avant tout grâce aux 40% auxquels il faut ajouter les allocations diverses et variées attribuées aux couches populaires et qui finissent, elles aussi, dans l'escarcelle békée. Et bien évidemment toutes les aides européennes pour nos gros planteurs.

   C'est pourquoi on est en droit de sourire quand on lit dans le quotidien local les pleurnicheries suivantes : "Le couple de dirigeants s'était lancé dans cette aventure uniquement avec ses fonds propres, non faute d'avoir frappé à plusieurs portes dans le public et le privé. " D'abord, on ne comprend pas ce que "le public" vient faire là puisque, jusqu'à preuve du contraire, nous vivons en système capitaliste. Il n'y a que dans les économies communistes dans lesquelles "le public" est un opérateur économique majeur ou premier. En économie capitaliste, les opérateurs sont les...capitalistes. Or, justement dit le journal, "le privé" n'a pas répondu à AVA AIR non plus ! Comme on le comprend : c'est cent fois plus facile et mille fois plus rentable de vendre des poulets congelés aux hormones, des pommes et des poires bourrés de pesticides, des chaussures de sport, du matériel de bricolage ou des moteurs hors-bord (à des prix exorbitants en plus !) que de se risquer dans un secteur aussi difficile que celui de l'aviation. Tiens ! On était persuadé qu'en système capitaliste, prendre des risques était l'un des credo des entrepreneurs (c'est ce que racontent tous les manuels d'économie). Pas en Martinique en tout cas !

   Mais le plus affligeant est que tous ces capitalistes, shootés aux 40% et aux subventions franco-européennes, pourraient faire un geste de temps en temps vu tout l'argent qu'ils ramassent et puisqu'ils ne perdent jamais une occasion de se proclamer "Martiniquais". Oui, de temps à autre, ils pourraient faire le geste d'investir dans le système productif en aidant les projets ambitieux et novateurs comme celui d'AVA AIR. Or, devant le tribunal de commerce de Fort-de-France où cette compagnie, en redressement judiciaire, s'est retrouvée l'autre jour, aucun repreneur ne s'est présenté. Aucun ! Aucune "grande fortune française de la Martinique" n'a jugé bon pour la Martinique d'aider un projet martiniquais, employant majoritairement des Martiniquais, à se pérenniser et même à se développer puisque des experts affirment que l'achat d'un second avion aurait pu permettre à cette compagnie de s'en sortir à moyen terme.

   Le cas d'AVA AIR s'est déjà répété dix fois, cent fois au cours des quatre décennies qui viennent de s'écouler et témoigne de l'impasse dans laquelle se trouve la Martinique. Société complètement bloquée qui, tôt ou tard explosera, et que ne pourra pas sauver nos "enfonceurs de portes" puisque, apparemment, c'est le nouveau nom par lequel il nous faudra nous habituer à désigner nos chers (es) parlementaires. Ces derniers pourront toujours tambouriner sur les portes des ministères parisiens, tout ce qu’ils ramèneront ce seront des aides, des subventions, des garanties d'emplois pour tel ou tel secteur, bref, rien qui relève de l'économie. Ou plus exactement d'un réel développement économique.

   Entre Békés et patrons de couleur prédateurs d'un côté et élus (es) "enfonceurs de portes" de l'autre, la Martinique est mal, barrée. Vraiment mal barrée...

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