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FAUT-IL BRÜLER LES PANTHEONS ?

Yves-Léopold MONTHIEUX
FAUT-IL BRÜLER LES PANTHEONS ?

L’actualité m’amène à reproduire une tribune parue en 2005 et qui ne paraît pas sans intérêt au moment où, en mode d’effet boomerang de l’esclavage et la colonisation, prospère un vent propice au déboulonnage des statues. A cet égard, les incidents iconoclastes qui se sont déroulés le 22 mai 2020 en Martinique ne constituent-ils pas le phénomène déclenchant d’un mouvement mondial qui pourrait n’être qu’à ses débuts ? Seize ans plus tard nul n’est besoin d’en rajouter, sauf à considérer qu’on ne s’achemine pas vers l’érection de nouvelles statues et que ceux qui voudraient que celle de Césaire trouve bonne place à Fort-de-France pourrait en avoir pour leurs frais. N’est-ce pas la première entorse avérée faite à l’aura du Nègre fondamental que de l’associer au rejet de Schoelcher ?

Yves-Léopold Monthieux, Fort-de-France – 10 juin 2020

 

Décembre 2005

Toussaint-Louverture au Panthéon, c’était le sujet de ces derniers jours[1]. Mais au moment où les remises en question ainsi que les revers de médailles tourneboulent l’histoire et où les héroïsmes révèlent la part d’ombre qu’ils portent inévitablement en eux, la question se pose de savoir ce que valent encore les panthéons.

Les dernières révélations sur un « nobélisable » de l’Asie du Sud-Est confirment qu’en grattant un peu, et parfois très peu, il est presque toujours possible de trouver sous la peau du héros ou du savant des comportements douteux. De même que Napoléon rétablit l’esclavage tout en créant le code civil, tel savant a pu atteindre la gloire grâce à des moyens inavouables, tel sportif tenir la sienne de l’usage de stupéfiants, et le château de Versailles se révéler le résultat tant du génie de l’époque que des crimes qui ont accompagné sa construction. Par ailleurs, il n’est pas rare que des personnalités rendues célèbres pour leur humanisme affiché se soient rendues coupables de comportements odieux à l’égard de leurs proches ou de leur entourage. Après tout, le bon roi Saint Louis rendait justice sous son chêne en appliquant parfois à ses sujets des peines inhumaines comme les ordalies, des mesures antisémites comme le bannissement des juifs, qui étaient celles du droit de l’époque. [voir tribune L’icône Gandhi trébuche  Y-LM(Internet)]

C’est ainsi que sur le mode de la parodie, le professeur Emmanuel Terray écrit dans le Monde : « Je propose donc que, toutes affaires cessantes, le Parlement consacre sa prochaine session à un réexamen de l'histoire de France. Il s'agirait d'abord de recenser tous les crimes contre l'humanité qui ont été commis durant cette histoire, de les reconnaître comme tels par la loi, et d'en interdire l'apologie. Il s'agirait ensuite d'identifier les coupables de ces crimes, de condamner expressément leur mémoire, de détruire les monuments de toute nature qui ont pu être élevés en leur honneur dans le passé et d'interdire à l'avenir tout éloge ou tout hommage qui pourrait leur être adressé ». Les places de Paris deviendraient alors bien vides et la France, sans mémoire.

En somme, la célébrité n’empêche pas que les hommes soient tout simplement des hommes, lesquels changent le monde et changent avec le monde.  Ainsi, en fonction de l’époque et des valeurs en cours, des hommes illustres peuvent se voir accorder ou refuser la reconnaissance nationale ou universelle, d’autres, qui en ont été honorés, se la voir remise en cause. Si bien que cette gratitude de la société, qui peut être éphémère, s’applique généralement à une tranche de vie et, à l’intérieur de celle-ci, à une discipline particulière. Par ailleurs, des vies écourtées ont parfois évité à de jeunes talents d’affronter à leurs dépens l’épreuve de la durée. On n’ose prendre l’exemple du Christ et de son bref passage dans ce monde.

Plus modestement, comparons Frantz Fanon et Aimé Césaire. Le premier a quitté prématurément la vie, laissant l’image du révolutionnaire pur et dur. Un peu comme Che Guevara. Nul ne sait ce que serait aujourd’hui, s’il vivait encore, l’homme des « Damnés de la terre ». En revanche, au cours de son long exercice, M. Césaire a dû affronter mille occasions de remettre en question sa foi politique. En effet, la longévité des grands hommes peut réserver des surprises.

Quant à Toussaint-Louverture, qui a possédé ses propres esclaves, il n’a pas échappé aux pratiques en vigueur. Mais qui pourra enlever au héros d’emprunt des « révolutionnaires » martiniquais sa tunique de vrai héros de la révolution haïtienne ? (cembre 2005)




[1] Proposition faite par les chevènementistes en décembre 2005.

 

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