Être une femme issue d’une Première Nation « revient à se promener avec une cible dans le dos », a soutenu Michèle Audette devant un comité parlementaire qui se penche depuis quelques mois sur le racisme systémique au sein des services policiers au Canada.
L'ex-commissaire de l’Enquête nationale sur les femmes et les filles disparues et assassinées (ENFFADA) a lu ces mots transmis par une femme autochtone qui lui a aussi confié qu’être une Autochtone signifie trop souvent encore être en mode survie
, se sentir sur ses gardes
, surveillée
.
Lors de sa prise de parole mercredi en fin d’après-midi, Michèle Audette a aussi souligné les propos d’une autre Autochtone qui aurait aimé pouvoir tourner la page sur le cas de sa sœur, mais qui déplorait le manque de communication entre les différents services policiers. Dans la réserve, le cas de ma sœur n’était pas important, à l’extérieur de la réserve, les gens ne se sentaient pas interpellés
, a rapporté Mme Audette.
Elle en appelle maintenant à des actions tangibles. Beaucoup de rapports vous ont donné des preuves, beaucoup de commissions d’enquête vous ont donné des preuves, a-t-elle lancé. Donc, maintenant, au tour des élus, des députés hommes et femmes de nos institutions démocratiques d'honorer les appels à l’action et à la justice, les appels à l’action et toutes les recommandations qui en découlent. Il y a en au-dessus de 1200 au cours des 40 dernières années
.
L’ancienne commissaire n’a pas manqué de rappeler que le racisme systémique est présent, selon elle, dans différentes institutions au pays et pas seulement auprès des forces policières. Elle a fait référence au cas de Joyce Echaquan, morte sur son lit d’hôpital peu de temps après s’être filmée.
Peu importe les institutions, ce racisme systémique est trop présent.
Dans leur rapport, les commissaires de l’ENFFADA
recommandaient notamment la création d'un ombudsman et d'organismes de surveillance de la police, pour mettre fin à la discrimination et au racisme de la part des autorités.
Mme Audette est revenue à la charge avec cette idée devant le comité. « À force d'entendre des témoignages qui perdurent depuis plusieurs décennies, on a l'impression qu'il y a une culture tissée serrée et que les gens se protègent entre eux et elles. Alors que si on met, dans ce milieu-là, un endroit où je sens que je peux porter plainte, où je peux amener une situation et qu'on va me prendre au sérieux, que je ne serai pas jugée à la suite de discrimination, et ainsi de suite », a-t-elle avancé.
Selon elle, plusieurs sociétés ont un outil de la sorte, citant en exemple le Bureau des enquêtes indépendantes au Québec.
Pour Michèle Audette, le changement passe par une meilleure éducation, « pas juste une formation de quelques heures » dans les forces policières. Elle se demande « comment ça se fait qu'en 2020, encore, on nourrit nos leaders d'aujourd'hui et de demain, dans nos écoles primaires et secondaires et universitaires, à une histoire qui n'est pas adéquate? »
D’après elle, les jeunes ont envie de connaître l’histoire. « Alors tout ça, pour moi, c'est l'outil le plus fort », a-t-elle fait valoir.