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Disparition de Marvin Fabien, un artiste contemporain caribéen

Dominique Berthet
Disparition de Marvin Fabien, un artiste contemporain caribéen

L’artiste Marvin Fabien, originaire de la Dominique, est décédé le 26 novembre 2020, dans sa 42e année. Il incarnait la discrétion, l’efficacité, le dynamisme, le partage, la détermination, la générosité. Les derniers mois, il a lutté avec beaucoup de courage contre la maladie. En dépit de ce qu’il endurait, il a poursuivi sa pratique artistique et ses recherches dans le cadre de la thèse qu’il avait entreprise. Il était un créateur pluridisciplinaire hors norme : peintre, artiste multimédia, performeur, musicien, compositeur. Parallèlement, il était doctorant à l’Université des Antilles, inscrit en cinquième année de thèse, travaillant sur L’Émergence des nouveaux médias dans les pratiques artistiques de la Caraïbe insulaire. Il était brillant.

Après des études à l’École d’art de Martinique (IRAVM), il s’était donc inscrit en master puis en thèse à l’UA. Il participait régulièrement aux conférences et colloques organisés par le CEREAP (équipe interne du CRILLASH). Il avait publié ces dernières années dans la revue Recherches en Esthétique des recensions, ainsi que des articles. J’avais, dans le 23e numéro de cette revue (2018), également publié un entretien de lui, dans lequel il évoquait son parcours, sa démarche et ses pratiques artistiques. Ces deux dernières années, il avait enseigné en tant qu’ATER dans cette université, laissant chez tous, le souvenir d’un enseignant compétent, à l’écoute, impliqué.

Du point de vue artistique, sa création est profondément ancrée dans la Caraïbe. S’intéressant à la musique populaire caribéenne, il a développé un travail autour de la culture Bouyon. Ce courant musical né à la Dominique, s’approprie des styles musicaux comme le jump-up (apparu au milieu des années 1990), le dancehall (musique populaire jamaïcaine qui se développe à la fin des années 1970), et la soca (originaire de Trinidad-et-Tobago dans les années 1970). La musique bouyon s’est répandue ensuite dans les Petites Antilles accompagnée de danses provocantes et de paroles grivoises. Le son et le corps sont de fait au cœur de cette culture populaire. Marvin Fabien traitera ce corps au travers de différents médiums : le dessin, la peinture, le collage, la performance, la vidéo ou encore l’Art sonore (sound art). Le son tient une place importante dans sa création lui permettant de mettre en scène et en œuvre le corps. Il transgressait joyeusement des codes et les normes artistiques, hybridant, mélangeant les médiums à souhait.

Marvin s’est beaucoup investi dans la préparation et le déroulement des deux FIAP (Festival International d’Art Performance) qui se sont tenus en Martinique en 2017 et 2019, à l’initiative de ses amis Annabel Guérédrat et Henri Tauliaut, avec la participation d’artistes performeurs internationaux. Au cours de ces manifestations, Marvin Fabien réalisa plusieurs performances très remarquées, parfois en collaboration avec d’autres artistes. Il réalisa aussi d’autres performances comme à Miami en 2017 lors de la Miami Art Week au Prizm Art Fair, et à Porto-Rico en 2018 dans le cadre du Mecca Art Fair.

Jusqu’à son dernier souffle, il a supervisé à distance une exposition prévue de longue date, qui sera visible à Fort-de-France, à l’Atrium, galerie La Vérada, logiquement à partir du 15 décembre prochain, date de la réouverture des lieux culturels. Cette exposition portant le titre Caribbean bodies: of shining fragments présente trois séries d’œuvres très récentes, parmi lesquelles celles réalisées les derniers mois de son existence. Cette exposition aura valeur d’hommage.

Ami, tu resteras ancré dans les mémoires de tous ceux que tu as marqués par ta personnalité joyeuse et attachante. Tes créations sont là comme de magnifiques traces. À travers elles, tu demeureras toujours présent, car les œuvres résistent à la mort.

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