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Coronavirus : il nous faut des Cubains !

Yves-Léopold MONTHIEUX
Coronavirus : il nous faut des Cubains !

La Martinique médicale serait en perdition, pas seulement pour cause de covid-19. Dans la situation d’abandon où elle serait laissée par la France, seule Cuba serait en mesure de la sauver. Est-ce une nouvelle déclinaison du célèbre cri de guerre Hasta la victoria siempre ?

Hasta la victoria siempre !

« Les médecins de l’esclavagisme », comme les accuse la presse internationale ne seraient pas seulement les bienvenus en Martinique, mais ardemment espérés. En guise de SOS et, au chant du regretté « article 74 », on assiste à des enfoncements de portes à n’en plus finir (plus de masques, plus de gants, plus de tests, plus de pouvoirs, …), sous le mode « il faut que - il faut que – il faut que… l’Etat français - l’Etat français – l’Etat français …assume ses responsabilités ». Et plus vite que ça !

Ainsi donc, l’appel aux sauveurs cubains revient sans cesse dans la flambée épistolaire de sociologues, psychologues, anthropologues, historiens, bref d’activistes de la plume qui ont retrouvé la voix après des mois de désintérêt. Pour l’ARS et le préfet qui tiennent les manettes de la lutte contre le corid-19, il y a, pour l’instant, plus de moyens qu’il n’en faut. Que nenni, vous assurent ceux qui se réveillent à peine, ce sont des mensonges, il nous faut des Cubains !  Car, argument massue et combien à propos, comme pour le chlordécone, nous serions « une nouvelle fois les victimes de ce qui s’apparente à un génocide organisé ». En un rien de temps et de réflexion, la boucle est bouclée.

Notre sénatrice a impressionné par ses initiatives et ses interventions télévisées qui souhaite l’installation de médecins cubains en Martinique, et qui a été entendue par le gouvernement. Enfin, une élue qui se mouille, entend-on, dans les chaumières. Rayonnante, elle avait cru remporter le morceau, mais c’était ignorer le principe souvent rappelé par nos Machiavel tropicaux selon lesquels celui qui détient le chéquier est celui qui décide. Or, apparemment, la Martinique a un fonds de caisse inépuisable. Par ailleurs, ils savent pouvoir compter sur le peuple qui a été mithridatisé par 40 ans de clientélisme venant de tous les azimuts, de même que sur le haussement d’épaules du pouvoir régalien qui, ayant d’autres chats à fouetter ne leur refuse rien. La Martinique paiera donc sans marchander le transport, l’hébergement, la nourriture, les services non faits durant la quatorzaine, en espérant pouvoir un jour justifier leur venue. Dans combien de temps ? Qu’importe, on est riches !

Eclair dans la grisaille intellectuelle, un homme réagit, un emmerdeur, toujours le même, Raphael Confiant : « N'est-il pas indécent de voir des citoyens de la 5è puissance économique mondiale se disputer la venue de ces praticiens de l'île de Fidel ? C'est, ajoute-t-il, la question qu'on est contraint de se poser quand on voit les déclarations, postures et parfois gesticulations à propos de la venue des médecins cubains ». En guise de rappel au bon sens et d’appel à la dignité, il y en a pour tout le monde : amis, ennemis et faux amis. Quant à la dignité, « Vous n'avez pas honte d'être obligés d'avoir recours à un pays …où le PIB par habitant est cent fois plus faible qu'en Martinique ou en Guadeloupe ? ». On ne saurait mieux inviter les intellectuels cubanolâtres à s’enlever un « ti caca bo zié » pour mieux voir les horreurs qui se cachent derrière les porteurs de drapeaux en blouses blanches.  Ce n’est pas gagné.

Des blouses blanches porteurs de drapeaux ou des porte-drapeaux en blouses blanches

Entendons bien. On ne peut que saluer l’école et la médecine de Cuba qui sont mondialement reconnues, ce qui distingue cette dictature de tous les autres. A bien des égards, ces performances sont comparables à celles de nations développées. L’aide soviétique faisant défaut, on n’est plus à l’époque où des brigades cubaines de sinistre mémoire avaient pour mission d’exporter la révolution. De sorte qu’on peut se réjouir que le scalpel ait remplacé le fusil, sauf que ces performances s’accompagnent de blessures humaines physiques et psychologiques qui conduisent à ne pas verser aveuglément dans l’émotionnel idéologique. Les brigades de guerre sanitaires, comme les anciennes brigades de guerre militaires, ne sont pas de vertueuses associations caritatives ou de bienfaisance. Produits d’exportation, ces médecins et auxiliaires exercent une activité lucrative dotée de toutes les caractéristiques du capitalisme d’Etat tel que mis en œuvre par un régime communiste. Ces soignants ne se déplacent pas sans leurs drapeaux et leurs commissaires politiques. D’où la question : sont-ce des blouses blanches porteurs de drapeaux ou des porte-drapeaux en blouses blanches. Leurs salaires sont payés directement à l’Etat cubain qui ne leur reverse au mieux que 20% de leur montant. Afin d’éviter des désertions à l’étrangers, leurs familles sont prises en otage dans l’île et sont soumis à des règles d’airain. Cette situation a conduit au dépôt d’une plainte contre Cuba devant la Cour pénale internationale (CPI) de la Haye pour « crimes contre l’humanité pour des faits d’esclavagisme». Dès lors, l’assertion selon laquelle les Cubains seraient « le peuple le plus humanitaire du monde » relève de la complaisance coupable ou de l’idéologie la plus obsédante.

Le retour d’émotionnel idéologique des années soixante

En réalité, les dirigeants politiques martiniquais font assaut de rivalités pour récupérer le retour d’émotionnel idéologique des années soixante que nous appellerons la cubamania. Les Cubains ne parlent ni le Français ni le Créole. Peu d’entre eux (11%) sont afro-descendants, d’où un racisme structurel à leur égard qui les amène à être toujours les premiers à affronter les risques. Tandis que les 2/3 de la population, d’origine européenne, ont développé une nomenclature qui détient sans partage le pouvoir. Ceux-ci sont très attachés à la culture espagnole qu’ils entretiennent à travers divers organismes culturels dont l’Orchestre national symphonique de Cuba et autres théâtres nationaux. Ce sentiment suprématiste n’est-elle pas à l’origine de la « tendresse » manifestée pour cette dictature par les démocraties d’Europe ?

Nous proclamons urbi et orbi qu’ils sont nos « frères caribéens » et nous servent de modèles, alors que nous snobons ceux qui sont les plus proches par la géographie, partagent notre culture et nous ressemblent, comme les Ste Luciens, les Dominiquais, les Barbadiens... Ce sont, bien entendu, ceux qui sont proches de nous à tous égards, les médecins haïtiens dont certains soignent les Martiniquais depuis de nombreuses années, et ont largement démontré leur compétence. Reste que les Cubains, comme les autres, doivent échapper à tout ostracisme, sans qu’ils prétendent ou qu’on prétende pour eux avoir le privilège de la compétence et du nombre. Il conviendrait alors que leur présence chez nous soit suffisamment étudiée pour qu’ils ne puissent pas justifier l’accusation d’esclaves de la dictature.

Fort-de-France, le 08 avril 2020

Yves-Léopold Monthieux

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