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CHLORDÉCONE : CHRONIQUE D’UN NON-LIEU ANNONCÉ

Louis BOUTRIN
CHLORDÉCONE : CHRONIQUE D’UN NON-LIEU ANNONCÉ

Martinique – Guadeloupe, 20 & 21 janvier 2021. Après quinze années d’instruction, la justice française s’est enfin décidée à entendre les parties civiles dans le dossier du Chlordécone, un scandale sanitaire sans précédent, dénoncé durant des décennies par bon nombre d’associations écologiques.

L’annonce de la probabilité d’un non-lieu motivé par une prétendue prescription a suscité une vague de consternation et d’indignation tout à fait légitime eu égard à la contamination généralisée des peuples martiniquais et guadeloupéens et à l’urgente nécessité d’y établir les responsabilités, de désigner les coupables, de réparer le préjudice subi et d’indemniser les victimes.

Néanmoins, pour clarifier la situation, il convient d’expliquer, en des termes simples et compréhensibles par tous, les dessous de ladite prescription ainsi que les réelles motivations des autorités étatiques et judiciaires dans ce qui s’apparente, de toute évidence, à un déni de justice.

A la lecture des plaintes, les juges d’instruction se heurteraient à plusieurs limites procédurales, la première, la prescription de l’action civile et la seconde, la disparition des documents d’archives ce qui constituerait un obstacle majeur à la manifestation de la vérité.  

Il y a prescription quand l’auteur d’une infraction ne peut plus être poursuivi, c’est-à-dire jugé devant un tribunal. Le point de départ de cette prescription étant le jour de la commission de l’infraction, mais il existe des exceptions.

En l’espèce, les faits remontent à 1993, date de la suppression de l’autorisation de mise sur le marché du Curlone (Chlordécone). Le délai de prescription pour un crime étant de 10 ans au moment de la réalisation de l’infraction, les faits seraient donc prescrits à compter de 2003.

En clair, les associations qui se sont constituées partie civile ont porté plainte en 2006 pour la Guadeloupe et 2007 pour la Martinique.  Dans leur logique, les juges d’instruction estiment qu’ils sont tout à fait fondés à prononcer un non-lieu c’est-à-dire l’abandon définitif de toute action judiciaire. Peu importe donc la durée de la période d’instruction, 2 , 14, 15 ou 20 ans, ce qui fait foi c’est le point de départ de la prescription de l’action civile. La plainte de Guadeloupe qui met en mouvement l’action publique survient en 2006 alors que les faits seraient déjà prescrits depuis 2003.

Cependant, les avocats des parties civiles contestent fermement cette hypothèse puisque plusieurs faits qui révèlent des infractions occultes, viennent interrompre ladite période de prescription, notamment des infractions ayant fait l’objet de procès-verbaux dont la justice ne retrouverait plus les traces.

S’agissant des autres limites procédurales évoquées, elles sont tellement surréalistes qu’elles ne peuvent constituer des obstacles à la manifestation de la vérité au point d’entraver les investigations et de prononcer un non-lieu. A cet effet, la disparition volontaire ou involontaire de documents des archives des douanes, celles du Ministère de l’agriculture, des Tribunaux évoquée par les juges d’instruction n’est tout simplement pas recevable.

Visiblement, les limites de l’acceptable sont franchies. Après avoir manqué à leur devoir de protection des populations, les autorités judiciaires et étatiques continuent de ruser avec leurs propres principes !

Si la France est véritablement un pays de Droit,

Si la France est réellement un pays des Droits de l’Homme,

Et, si la Martinique & la Guadeloupe sont véritablement des territoires français relevant de l’article 73 de la Constitution,

Alors oui, les lois et règlements de la République doivent s’appliquer de plein droit sur nos territoires.

Cela veut dire que la Justice française se doit d’intervenir dans ce dossier du Chlordécone exactement comme elle l’a fait dans l’affaire du sang contaminé, celles de l’amiante et du Médiator.

Cela veut dire, qu’après 15 longues d’années d’investigation, ce scandale doit sortir de la confidentialité des bureaux des juges d’instruction et être, enfin, tranché devant les tribunaux de la République.

Quand les experts judiciaires affirment que « Le chlordécone est un produit pour lequel les preuves sont suffisantes pour dire qu’il est cancérigène par des modifications épigénétique (National Center for Biotechnology Information 2019) », nous ne saurons succomber aux affres de l’ignominie humaine.

Quand des ouvriers agricoles ont été livrés sans protection aux effets d’un redoutable poison,

Quand nos sols, nos rivières, notre littoral, nos nappes phréatiques, nos sources sont durablement contaminés et cela pour plusieurs générations,

un tel crime contre l’environnement,

un tel crime contre la Martinique,

un tel crime contre le peuple Martinique ne saurait rester impuni.

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