A quinze jours des élections régionales, des centaines de milliers d'indépendantistes sont descendus vendredi dans les rues de Barcelone, en soutien aux listes prônant la sécession de la Catalogne. "Nous ne demandons pas la lune", a affirmé le président de l'exécutif catalan, Artur Mas, devant la presse internationale. "Nous aspirons à ce que la plupart des nations européennes ont déjà, c'est-à-dire un Etat."
La police a donné le chiffre de 1,4 million de manifestants. La préfecture, qui représente le gouvernement espagnol, estime cette participation entre 520.000 et 550.000 personnes.
En 2014, lors de la même manifestation, Madrid et Barcelone avaient déjà fait état d'évaluations contradictoires sur le nombre de participants. La préfecture du gouvernement espagnol avait estimé entre 470.000 et 520.000 le nombre de manifestants, alors que la mairie de la ville du nord-est de l'Espagne, tenue par les nationalistes, avançait le chiffre de 1,8 million.
L'élan vers une république indépendante
Artur Mas et ses colistiers ont formé une large coalition indépendantiste du centre droit à la gauche radicale. Ils présentent ce scrutin comme un plébiscite, pour ou contre leur projet de conduire la Catalogne vers la sécession en seulement 18 mois. Des centaines d'autocars ont convergé vers Barcelone, la seconde ville d'Espagne, pour transporter les militants brandissant le drapeau indépendantiste. Une large flèche jaune portée par des bénévoles a fendu la foule vers 17h00 (15h00 GMT ) sur cinq kilomètres dans la deuxième ville d'Espagne, pour s'emboiter dans une scène blanche, triangulaire. Un symbole évoquant, selon les organisateurs, l'élan vers une république indépendante, défaite du joug du royaume d'Espagne.
(Reuters)
Un grand drapeau catalan rouge et or accroché dans le dos, Nicolas Liendo, 39 ans, a dévalé les "Ramblas" pour aller rejoindre la manifestation prévue en fin d'après-midi : "C'est avec joie que nous voulons bâtir une nouvelle république catalane, sans roi, sans pouvoir central qui nous traite comme de mauvais enfants", explique à l'AFP ce chef d'un restaurant de la ville. Laura Alastruey, 24 ans, est venue de la ville de Vic, en moto avec son copain, pour soutenir "la création d'un pays catalan". "Plus qu'une question économique, ce qui compte pour moi, c'est la défense de la langue. Et cela relève d'un sentiment, je ne m'identifie pas à l'Espagne.
Un scrutin "historique"
Depuis 2012, la région n'a eu de cesse de réclamer un référendum, sur le modèle des consultations sur la souveraineté du Québec et de l'Ecosse qui se sont soldées par la victoire du non. Le président du gouvernement espagnol, le conservateur Mariano Rajoy, l'a toujours refusé, faisant valoir que, selon la Constitution, il revient à tous les Espagnols de se prononcer sur l'unité du pays.
Mais le Parti populaire qu'il dirige prend désormais très au sérieux ce scrutin qu'il juge "historique". La Catalogne n'a pas reçu, depuis longtemps, autant de visites de ministres, portant la bonne parole dans cette région de 7,5 millions d'habitants représentant 19% du PIB de l'Espagne et responsable de 25% des exportations.
Vers une majorité absolue au Parlement catalan?
Selon les sondages, les deux listes indépendantistes - "Junts pel si" et celle la CUP (extrême-gauche) - obtiendraient une majorité absolue en sièges au parlement catalan (68 à 74), sans pour autant réunir la moitié des voix (44 à 46%). Or Artur Mas affirme que 68 sièges lui suffiraient pour lancer le processus devant aboutir à une déclaration unilatérale d'indépendance d'ici 2017.