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22 ANS APRES L’EXTERMINATION DE 8 000 MUSULMANS A SREBRENICA, LES SERBES DE BOSNIE NIENT LE GENOCIDE

22 ANS APRES L’EXTERMINATION DE 8 000 MUSULMANS A SREBRENICA, LES SERBES DE BOSNIE NIENT LE GENOCIDE

Seulement deux décennies se sont écoulées depuis l’horreur du génocide contemporain qui a fait de la ville martyre de Srebrenica un immense charnier, frappant en plein cœur un Vieux Continent qui se targuait, depuis les heures funestes du nazisme, d’avoir éradiqué en son sein la barbarie à visage humain, et déjà le déni de cette effroyable épuration ethnique et de son long cortège de victimes musulmanes (8 000 hommes) fait son chemin dans les esprits, au point d’être taraudé par une question angoissante : une telle abomination commise à nos portes, froidement et méthodiquement, pourrait-elle à nouveau survenir dans une Europe gangrenée par la résurgence des nationalismes et l’islamophobie ?

Depuis ce mois de juillet 1995 macabre, planifié et orchestré par les bouchers serbes que furent Slobodan Milošević, Radovan Karadžić et Ratko Mladić, au cours duquel 8 000 Bosniaques musulmans, jeunes et moins jeunes, furent séparés de leurs proches, emprisonnés, torturés et abattus, avant d’être jetés dans des fosses communes, parfois éloignées d’une vingtaine de kilomètres, la force dévastatrice du racisme anti-musulmans a rechargé ses accus en Serbie et contamine la Republika Srpska, cette région semi-autonome du nord et de l’est de la Bosnie-Herzégovine, passée aux mains des Serbes de Bosnie, qui comprend Srebrenica.

Placée sous le joug des Serbes de Bosnie dont l’écrasante majorité affiche fièrement son négationnisme, balayant d’un revers de main la qualification officielle de génocide qui, aux yeux du Tribunal Pénal International pour l’ex-Yougoslavie, est pourtant la seule désignation appropriée à la monstruosité de ce crime de masse, Srebrenica pleure toujours ses morts après 22 ans d’un interminable deuil, rendu longtemps impossible par la recherche désespérée des dépouilles.

« Le déni du génocide nous fait mal », a confié Mejra Dzogaz, submergée par l’émotion, aux journalistes Alastair Sloane et Peter Oborne venus enquêter sur « L’histoire macabre de la dissimulation de Srebrenica ». Pour cette femme arrivée au soir de sa vie, le temps n’apaise nullement la douleur d’avoir perdu ses deux fils, assassinés dans les collines entourant Srebrenica.

« Nous espérons toujours que les négationnistes finiront par revoir leurs positions et par penser à nous et à toutes les autres mères. Mais tout ce qu’ils veulent faire, c’est nier. Si vous allumez la télévision, tout ce que vous entendez, ce sont ces personnes en train de nier. Nous pleurons encore et toujours et ils continuent de nier », s’indigne cette mère dont le cœur saigne depuis cet été mortifère de 1995. Elle décrit l’effroi qui la saisit à chaque fois qu’elle croise, au détour d’une rue, des Serbes qui ont perpétré ces massacres et qui se drapent désormais dans leur respectabilité de notables, siégeant au Conseil municipal ou occupant de hautes fonctions au sein de la police locale.

Alors que chaque année, la ville martyre de Srebrenica se rappelle à nos mémoires lors de la commémoration, poignante et solennelle, des atrocités qui l’ont à jamais marquée de leur empreinte sanglante, il se pourrait que les préparatifs soient, cette année, fortement perturbés par le nouveau maire de la ville Mladen Grujičić, un homme politique nationaliste serbe qui nie de toutes ses forces le génocide anti-musulmans, allant jusqu’à refuser d’employer le terme qui lui écorche la bouche.

« C’est une ironie cruelle de constater que l’élection à Srebrenica d’un maire qui nie le génocide n’a été rendue possible qu’en raison du nettoyage ethnique de sa population musulmane », fait observer le docteur Waqar Azmi, président de Remembering Srebrenica, une association caritative britannique.

En 2015, une enquête d’opinion terriblement édifiante révélait que 54% des personnes interrogées en Serbie reconnaissaient la brutalité du crime commis en juillet 1995, mais que 70% d’entre elles réfutaient l’idée même du génocide.

Parmi les nombreuses sources d’inquiétude nées de leur pérégrination au cœur de la Serbie d’aujourd’hui, les reporters Alastair Sloane et Peter Oborne ont été traversés par un frisson de peur en apprenant les liaisons dangereuses nouées entre l’administration Trump et les nationalistes Serbes de Bosnie, farouches tenants des thèses négationnistes.

En effet, le premier magistrat de Srebrenica, Mladen Grujičić, a eu l’insigne honneur d’être invité à participer au grand rituel du petit-déjeuner national de prière à Washington, deux semaines après l’investiture du 45ème président des Etats-Unis, se réjouissant de l’opportunité qui lui était offerte de « nouer des contacts avec des personnes importantes ».

L’inquiétude est à son comble, quand on découvre la noirceur de la pensée qui anime Milorad Dodik, le président de la Republika Srpska, au sujet du massacre génocidaire de Srebrenica : « c’est la plus grande supercherie du XXème siècle ! », assène-t-il sur un ton glacial qui trahit une haine anti-musulmans implacable.

De là à imaginer que le scénario du pire pourrait se répéter dans une Europe frappée d’amnésie et de cécité, où refont surface les vieux démons, il n’y a qu’un pas que les deux journalistes britanniques ont franchi avec une extrême anxiété.

 

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